Sweet Paradise
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilAccueil  Dernières imagesDernières images  RechercherRechercher  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
-45%
Le deal à ne pas rater :
PC Portable LG Gram 17″ Intel Evo Core i7 32 Go /1 To
1099.99 € 1999.99 €
Voir le deal

Partagez | 
 

 • A Deux Pas de l'Enfer •

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
AuteurMessage
Le Jokker

Le Jokker

Réglisse qui glisse


- MESSAGES : 365
- DATE D'INSCRIPTION : 16/01/2011
- AGE : 28
- LOCALISATION : Zbeum :3 Bobo la tête >0<
- HUMEUR : M. ? Save me.

Papiers
- TEAM: Nounours :3
- PROFS, ELEVES: Pleins de p'tits n'élèves
- RELATIONS:
• A Deux Pas de l'Enfer • Vide
MessageSujet: • A Deux Pas de l'Enfer •   • A Deux Pas de l'Enfer • EmptySam 22 Jan - 21:49

Coucou tout le monde


Depuis un petit mois, je me suis mise à écrire ma propre histoire.
L'écriture c'est ma drogue...mouahaha What a Face
C'est très compréhensible que vous ayez la flemme de lire en voyant la taille...
Je vous en voudrais pas...x3 (quoique...)

Si vous voulez voir à quoi ressemblent les personnages, bah va falloir m'offrir un joooli scanner parce que je les dessine moi-même en style manga. ;3
Désolée d'avance pour les fautes j'me relis pas souvent ! >w<
Autre chose : Les noms & prénoms ont une prononciation Japonaise. ;3

Merci de respecter mon travail (qui a duré de nombreuses heures).
Bonne lecture ! ♪ (si jamais vous lisez >0<)



I. Premier Chapitre - Lui qui apporte la Nuit

La vallée s'éveillait dans son râle singulier. Familier pour ceux qui ont l'habitude d'ouvrir les yeux ces longs matins gris et brumeux. Comme moi en clair. J'aurais pu choisir de rester plongée dans ma propre fiction de ce qu'étaient les rêves, mais j'ai préféré garder un côté optimiste, même...Réaliste, disons. Un fou aurait pu comparer ça à un rêve. Enfin, je ne sais pas trop comment ça se passe dans leur tête mais ça devait être à peu près de ce style là. Oui. c'était juste un cauchemard, mais celui-ci était inévitable, et horriblement rabacheur..

Pour ceux qui ne me connaissent pas - et je n'ose préciser qu'ils doivent être énormément nombreux puisque je suis semblable à un fantôme, je suppose - je suis Ayame Klein. Bon, Aya pour faire plus court - oui les intimes c'est pas si important. J'ai quelques années. Seize pour être plus précise. J'ai une description physique des plus banales, en clair des cheveux chatains clairs légèrement bouclés avec quelques reflets blonds, des yeux verts clairs en amande, et une peau ni trop bronzée ni trop pâle, que pourraient justifier mes nombreuses échappées au bord de la mer. Pour le caractère, je n'en ai pas un des plus étonnants non plus. Je suis déterminée, émotive et parfois trop gentille. Je suis aussi égoïste, possessive et - très - impatiente. Ah oui ! Ambitieuse bien sûr. Tout le monde est ambitieux, non ? Si, on a tous un rêve, un but, j'en suis certaine. Le mien..? C'est qu'il se passe quelque chose de "spécial" dans ma vie. Je ne veux pas d'une existence monotone. Je sais que c'est quasiment impossible. Mais c'est un rêve, et un rêve a besoin qu'on y croit profondément pour continuer d'exister. Je le fais simplement en simple connaissance de cause : combien y a-t-il d'âmes brisées dans les rues du monde entier ? Quelques centaines de millions. Alors j'y crois. Je la laisse vivre pleinement comme elle en a besoin, cette petite part de lumière. Et elle ne doit pas s'éteindre, car je sais que si elle disparait, je plongerai avec elle dans les Ténèbres. A cette époque là, je les fuyais. Et je L'ai rencontré. Il m'a appris que la grande part maléfique est si tentante, en réalité. Elle m'apprécie elle aussi, je le devine. Apprenez à le connaître. Ecoutez ma vie.

L'été doit être ma saison préférée. Pourquoi ? Les vacances, quelle question ! C'est un soulagement, une période où l'on peut respirer "pleinement". A chacune de ces longues périodes, je vais, avec mes parents - et mon chien, rendre visite au reste de ma famille. C'est un petit coin perdu dans la campagne, dans le Nord Est de l'Angleterre. Plus au Nord qu'à l'Est en fait. C'est peut être le haut du pays, mais ce n'est pas pour autant qu'il fait un temps différent que dans les terres. C'est sur qu'il ne fait pas chaud non plus. J’aime voyager. J'aime aller là-bas. Et maintenant que je l'ai rencontré, c'est un lieu clé pour moi. En fait, ce personnage dont je parle, je le déteste. Je le hais de toute mon âme. Mais je suis seule, et il est toujours là. J'ai appris à le "supporter". Le fait que mon cerveau l'ai associé à cet endroit - la ferme de mes grands parents, ça a du aider au fait que je l'accepte un peu mieux dans ma vie. Et puis...Il fait partie de mon rêve, et c'est le plus important. Il a complété la part manquante de ma lumière. Quels sentiments je ressens à son égard ? C'est difficile à dire, mais je peux parfaitement affirmer qu'il m'évoque de la haine. Et surtout, surtout, j'ai peur de lui. Et je ne le cache pas.

Je laissais défiler le paysage vallonné derrière la vitre froide du train. De ma main gauche, je grattais paresseusement le tissu moletonné de mon fauteuil bordeau. Face à moi, il y avait mes parents. Mon père était un grand homme, il avait eu quarante-huit ans la semaine dernière. Il s’était laissé poussé une moustache, et portait des lunettes rectangulaires. Ses yeux étaient marrons, et une fine toison blonde recouvrait le dessus de son crâne. Il devait avoir des cheveux tirant vers le blanc, mais ce n’était pas très visible. William, c’était son prénom. Il tenait fermement un journal, plissant les bords du papier grisonnant. A sa droite, c’était ma mère. Holly. Blonde elle aussi. Elle avait les cheveux légèrement bouclés, tout comme les miens, à la différence de leur couleur. Mes yeux étaient la réplique des siens, c'est-à-dire le même vert clair. Elle avait maintenant quarante-deux ans. Elle faisait ses quarante trois cette année, le 13 octobre plus précisément. Elle avait un visage froid, aux traits durs et sévères, et aussi blanc qu’un cachet d’aspirine. Elle avait les yeux rivés sur un livre de mots-croisés. Pour finir, situé à ma gauche, il y avait mon chien. C’était un grand border collie blanc, gris et noir. Au niveau de sa tête, sur les joues et au dessus des yeux, il avait des tâches d’un marron très clair penchant vers le jaune. Sa tête reposait sur ses pattes pliées et il lui poussait sans cesse des baillements paresseux. C’était une femelle en fait. Jokeï. Et elle était très intelligente, plus qu’on ne le croyait. De caractère, elle me ressemblait trait pour trait, aussi têtue et déterminée. Fainéante aussi…Mais elle restait une copie de mon être…Dans un chien.

Whisterfine, une petite bourgade perdue dans le Nord Est, dans le centre de l'Angleterre. Le petit hameau était plutôt éloigné de la capitale, mais les grandes villes m'exaspéraient. Au moins, c'était un coin tranquille, en dépit de Birmingham, où l'activité était assez croissante. Déjà, j'apercevais les collines vertes et vallonnées, où paissaient tranquillement des troupeaux de moutons, gardés par les gros chiens de berger. Jokeï était de cette race. Les borders collies étaient au départ utilisés pour surveiller le bétail. "Les passagers de Wistherfine, veuillez vous préparer au prochain arrêt ; les passagers de Wistherfine, merci." Je saisis ma valise, et remis ma veste beige. Dehors, il faisait gris, et il y avait ce constant brouillard qui occupait les plaines humides. Mais ça ne changeait pas de d’habitude. Je savais déjà que chaque instant que j’allais passer ici serait comme un « remix » des précédents voyages, et pourtant, je continuais d’espérer qu’il se passerait quelque chose de différent. Si Dieu existe, il a du m’entendre. Je descendis le train tel un automate, tournant la tête de froite à gauche. Le quai était vide. Etonnament silencieux. Le brouillard abondant masquait les deux horizons. Mes parents sortirent une carte, et se mirent à chuchoter entre eux, comme s’ils avaient peur de troubler le silence. Jokeï s’avançait avec une étrange crainte vers ma droite. Je m’accroupis à sa hauteur, tentant de voir ce qui l’intriguait. Mais je ne vis rien. Si. Juste une ombre. Elle passait avec hâte. Je n’eus le temps d’apercevoir qu’une silhouette soutenant un chapeau noir. Je frottai vigoureusement la tête de la chienne. Elle tourna vers moi ses yeux d’une étonnante clarté. La voix de ma mère me tira de ma rêverie.

- Aya, ne reste pas plantée là !

Je saisis mon sac avec hâte et attacha une laisse au cou de Jokeï. J’emboîtai le pas de mes parents. Tout au long du chemin, je remarquai que l’ambiance n’était pas si habituelle que ça. Il n’y avait quasiment personne dans les ruelles pavées. Pas de vent non plus. Juste un air stagnant et humide qui glaçait les mains. L’air expiré laissait une vapeur qui se dissipait rapidement, et la brume froide était omniprésente au bout de chaque rue. En clair, nous avions du mal à nous repérer, malgré la petite taille du village. Après une heure de marche, ma mère bouillonait sur place.

- Bon. Il faudrait quand même se décider de la direction à prendre, Will ! J’ai l’impression de tourner en rond, là !
- Mais pourquoi tu me demandes ça à moi ? Je ne fais que te suivre, hein..


Je laissai un soupir m’échapper, et m’assis sur une bordure de béton entourant un carré de pelouse, où trônait un vieil arbre. Je n’écoutais même plus mes parents. Heureusement qu’il n’y avait pas grand monde dans les rues, j’aurais presque eu honte d’eux. Un petit sourire se dessina sur mes lèvres. Je frottai mes mains entre elles, et regardai instinctivement vers la droite. On pouvait toujours demander le chemin…Bon il y avait une personne là, c’était l’occasion. Laissant mes parents jacasser, je me dirigeai vers l’être planté au bout de la rue, observant une vitrine. Il était grand. Enfin non pas spécialement. Il portait un long manteau noir. Très long puisqu’on ne voyait pas ses pieds. Ses mains étaient dans ses poches. En fait…On aurait pu le laisser là, on aurait cru voir une statue.

- Excusez-moi Monsieur, vous êtes d’ici ? questionnai-je.
- Monsieur ? C’est un bien grand mot demoiselle.

Il retira son chapeau de pure classe britannique, et tourna la tête vers moi. Ah, en fait il était plutôt jeune. Dans les…dix-huit ans ? Sa voix était chaleureuse, il murmurait presque lui aussi. Ses mains étaient gantées de noir, de tel que le seul endroit où l’on voyait sa peau était son visage. Il était…D’une blancheur étonnante. Effrayante, même. Une feuille de papier. Une blancheur cadavérique !

- Oh…Vous allez bien ? Vous êtes si pâle !
- Je vais très bien, merci, répondit-il en souriant. Vous vouliez quelque chose en particulier ?
- Euh…je…Oui ! Je vous ai posé une question..
- Non, je ne suis pas d’ici. Je vis à Londres. Je ne connais donc pas ce petit hameau.
- Ah, excusez-moi.

J’avais dit ça, mais je restais plantée sur place. Depuis le début, ses yeux fixaient constamment les miens. Leur couleur ? Totalement étrange aussi. Mais des lueurs ténébreuses. Les contours de l’iris étaient noirs, un noir profond. Les nuances changeaient tout en s’étirant vers la pupille, laissant place au pourpre. Un véritable puits sanglant. Le pire dans tout ça, c’est que je n’arrivais pas à détacher mon regard du sien. Et mon cœur battaient plus vite que la normale. A tout ça s’ajoutait son petit sourire satisfait en coin. La raison de ce sourire ? Aucune idée…

- Quelque chose ne va pas ?
- Euh…Si si..Euh je veux dire non ! Non je vais très bien !
- Vous êtes sure ?
- Mais..Oui ! Qu’est-ce que..
- AYAME !!! Qu’est ce que tu fais ? m’interrompit ma mère.

L’inconnu leva la tête vers mes parents, prenant un air impassible, un visage de marbre parfait. Holly arrivait avec son petit air furieux qu’elle affichait quand elle n’était pas satisfaite du tout de la situation. L’homme aux yeux sanglants sourit amicalement. Ce n’était qu’une façade ! C’était horrible, mais j’avais l’impression de ressentir tous ses sentiments cachés. Mes yeux s’abaissèrent vers mes mains. Elles tremblaient. Pourquoi ? Pourquoi étais-je si affolée ? Je n’en savais rien. Et lui qui continuai de sourire normalement…

- Bonjour madame. Votre fille me demandai simplement si j’étais originaire d’ici. Certainement pour me questionner sur une direction à prendre.
- Bonjour. Je vois. Merci. Aller viens Aya nous partons.

Elle saisit ma main rapidement. Mais elle la lâcha aussitôt.

- Mon Dieu ! Tu es glacée ! Encore plus que moi et ton père !
- Pourquoi…Pourquoi Dieu et jamais le Diable ? questionna l’inconnu.

Mais qu’est ce qu’il racontait ? Cette question était vraiment trop étrange. Et maintenant que j’y pensais, c’était vrai, mes mains étaient presque faites de glace pure. Je gelais sur place. Ma mère regarda le jeune homme avec son tempéramment sévère, et arqua un sourcil.
- Eh bien…Parce que le Diable est mauvais ! C’est simple.
- Mauvais ? Pourquoi ? continua-t-il.
- Parce que dans la chrétienneté, il est le gardien des Enfers, et les gens en ont peur, c’est tout !
- Oh, je vois. Donc vous avez « peur » du Diable, c’est cela ?
- Si je devais choisir, alors je dirais oui. Maintenant, nous devons y aller, il se fait tard. Bonne soirée.
- Bonne soirée.

Il regarda Jokeï, qu’il carressa sur la tête. Son regard pivota ensuite vers moi.

- A bientôt Ayame.

Je n’eus pas le temps de répondre qu’il fit volte-face et se dirigea au fond de la rue, plongeant dans le brouillard. « A bientôt ? ». Je ne connaissais même pas son identité. Je ne le connaissais pas tout court en fait, tandis que lui paraissait tout savoir de moi. Chacun de ses faits et paroles avaient un peu plus glacé mes mains…Et sa dernière réplique laissait supposer que je me retrouverait de nouveau face à lui. Au fond de moi, je le voulais. Je souhaitais connaître son nom, et découvrir son attitude. Sa silhouette avait déjà disparu de ma vue, mais je fixai toujours la rue déserte. Je finis néanmoins par tourner la tête, interpellée par les appels excessifs de ma mère. Seulement, le brouillard s’était épaissi. Il formait comme une nappe de fumée, qui paraissait vouloir définitivement rester. Et le froid ne se faisait que plus acharné. Je fourrai mes mains dans mes poches après les avoir rapidement frottées entre elles. J’entendis mon père proposer à ma mère de trouver un petit hotel, une auberge, au moins pour cette nuit, afin que le brouillard se lève. Mais Holly répliquai, bravant les idées de Will, avec son air têtu de tous les jours, prétextant ne pas vouloir dépenser quelques sous pour un vulgaire brouillard.

- Papa, maman, si vous voulez que je gèle sur place, n’hésitez pas à me le faire savoir hein ! déclarai-je avec impatience.
- Je t’avais dit de prendre une veste plus chaude ! Et je vous avais aussi ordonné de prendre un billet de train qui partait plus tôt, ça nous aurait facilité la tâche, il fait quasiment nuit ! Mais vous ne m’obéissez jamais aussi…feula-t-elle.

Bon. Ok. Parler ne faisait qu’aggraver la situation, alors autant me taire. Les lampadaires s’allumèrent avec un petit grésillement, et je sentis ma mère se décontracter un peu sous l’effet de la lumière. Oui, ça nous facilitait la tâche. Je retournai m’assoir sur le petit terre-plein de verdure, toujours suivie de Jokeï. Mon regard observait une ruelle pas très éclairée. Ce genre d’endroit ne me rassurait pas vraiment en fait. Brisant mon reste de tranquilité en mille morceaux, j’aperçus une ombre – plus noire que le noir déjà présent – traverser la petite chaussée. Et ça allait vite ! Je sentis la chienne prendre du recul, je la vis mettre ses oreilles en arrière, puis je l’entendis grogner méchamment.

- Maman ?
- Rhoo tais-toi un peu Aya j’essaie de me concentrer sur la carte !!
- Ok ok, désolée..

Tout pour me rassurer. Les lampadaires ronds et lumineux clignotèrent à plusieurs reprises. Je les vis de mes propres yeux mourir de froid, se recouvrir de minutieux cristaux de glace qui s’étendaient à une vitesse étonnante. D’instinct, je portai ma main dans mon champ de vision. Elle tremblait. Mon cœur tremblait. Ma respiration tremblait, saccadée par le pouls rapide du sang projeté vigoureusement. J’essayais néanmoins de me calmer, de reprendre le contrôle de mon corps. Mais rien. La vapeur que formait ma respiration était projetée dans l’air glacé. Et j’avais peur, de plus en plus peur. De quoi ? Je ne savais même pas ! Mes yeux se fermèrent progressivement, comme plongés dans un sommeil de glace, et la dernière vision que j’eus fut celle d’une ombre, dressée au milieu d’une rue face à moi, avant de sentir des bras encercler mes épaules.

Une pièce difficilement éclairée, juste ça. La vision floue que m’offraient mes yeux fatigués paraissait être celle d’une petite caverne dans laquelle on aurait allumé un feu. Mes pupilles vertes claires pivotèrent lentement vers la petite lampe de chevet qui ne bougeait pas. Elle diffusait sa faible lueur orangée, immobile dans le silence somptueux d’un endroit que je ne connaissais pas. La lumière émise était instable, variant sur son intensité, tantot faible, tantot quasi inexistante, dissipant son ambiance malgré tout rassurante. Les coins de murs restaient cependant plongés dans les ténèbres. L’odeur qui régnait dans cette chambre était une effluve de grenier, sentant le vieux bois rongé, quelque peu la résine, et bien sûr, la poussière. Après avoir balayé la pièce de mes yeux fatigués et sceptiques, ma vision se figea sur une silhouette. La personne en question était assise sur le bord du petit lit. La clarté laissée par la lampe paraissait évanescente sur son corps habillé d’un long manteau noir. Ses prunelles écarlates pivotèrent vers moi. Un sourire malsain aux lèvres. L’inconnu ! Sans réfléchir une seconde de plus sur son cas, et sans me poser de questions sur une quelconque blessure, je me redressai avec une hâte particulière sur la couche, retenant un cri d’étonnement. Aussitôt que mes yeux avaient croisé les siens, la peur avait a nouveau enserré mon cœur. « Calme toi Ayame. Tu ne sais même pas pourquoi tu réagis comme ça.. » Il bougea encore plus vite que moi, et je sentis sa main gantée de noir s’appuyer sur mon épaule et m’applatir comme une poupée de chiffon sur l’oreiller moelleux. Il avait à peine bougé ! Ses sourcils s’étaient froncés, lui donnant une expression étrange, comme si il était frustré de ma réaction.

- Ne bougez pas si vite..Vous ne craigniez rien ici.
- Comment ça ? Comment ça je ne « crains » rien ? J’étais censée craindre quelque chose dans Whisterfine ?

J’avais répliqué plutôt vite. A en juger par sa petite moue embarrasée, je devais l’ennuyer plus qu’autre chose. Mais j’enchaînais encore.

- Et d’abord que faites-vous ici ? Et qui êtes-vous ? Où sont mes parents ?
- Oui vous craigniez quelque chose. Dans Whisterfine comme dans n’importe quelle bourgade, qu’elle soit en Angleterre ou en Inde d’ailleurs. Je suis Jashin ; c’est tout ce que vous avez à savoir de moi pour le moment. Vos parents sont en bas. Ils discutent avec l’aubergiste.
- Oh…Je vois..C’est une auberge. Et…qu’est ce que je crains ?
- Vous feriez mieux de vous reposer.
- Pourquoi suis-je ici ?

Le dénommé Jashin resta sans voix, fixant le vide. Il ne savait pas quoi dire ? Malgré le gant recouvrant sa main, toujours plaquée sur mon épaule, le froid commençait à darder ses piqures mordantes au travers du tissus. Une impression semblable à celle du contact d’un glaçon. Néanmoins, en sa présence, c’était comme si j’étais rassurée. Je ne savais pas pourquoi mais j’avais la sensation de lui faire confiance depuis toujours. Et pourtant il me faisait peur. Je n’arrivais à pas le cerner. Je ne savais que ressentir face à son humeur désordonnée.

- Vous comptez rester longtemps comme ça à me geler l’épaule avec votre main glacée ?

Il cligna rapidement des yeux et ramena sa main vers lui, gardant son sourire étrange aux lèvres. Il fourra sa main dans sa poche et se dressa sur ses jambes, surplombant ma fine allure recroquevillée. C’était une impression ou il ne répondait presque pas à mes questions ? Ou alors ça le gênait vraiment de parler ? Je ne savais pas vraiment quelle attitude adopter face à lui. Je plaçais mon poignet dans mon champ de vision et analysa rapidement les petites aiguilles d’argent pointant des nombres. Minuit et quart ? Impossible ! C’était quoi cette sieste ? On s’était perdus dans Whisterfine ? Mais c’était le brouillard…Autant de brume en été, c’était inimaginable. Le gel qui avait recouvert les lampadaires jusqu’à éteindre toutes les lumières, ça aussi c’était impensable. Je restai sans voix un instant, le regard posé sur le jeune homme. Il avait retiré son chapeau, dévoilant des mèches d’un noir de jais lui tombant dans les yeux. Ses cheveux plutôt longs étaient noués par une petite lanière de cuir. Je me remémorai rapidement les évènements de la soirée. Le froid avait pris place dans le petit village. J’avais ensuite aperçu une ombre se déplaçant furtivement. Les lampadaires s’étaient éteints, aussi. Et j’avais eu de plus en plus froid. Jashin m’avait dit « A bientôt » avant de me quitter, et il n’avait pas eu tort. La preuve, il était là, face à moi. Mais pourquoi étais-je là allongée dans ce lit ? Je n’avais pas pu tomber de fatigue, c’était impossible. Le froid m’aurait-il engourdie ? Possible…Restait à savoir pourquoi cette température était venue. Et je me remis encore à parler, comme ne pouvant plus m’arrêter de le questionner. Interpellé par ma voix, il tourna la tête vers moi.

- Je répète ma question : Pourquoi suis-je ici ?
- Le froid vous a dominé, dirait-on.
- Comment ça le froid ? Cette température est irréelle en été, même à Whisterfine !
- Parce qu’elle est irréelle justement. Elle a été créée.
- Créée ? Par qui ? Qui aurait fait ça ? Dans quel but ?
- Quelle soif d’apprendre ! Tu ne t’arrêtes jamais de me poser des questions ?
- Je ne vous permet pas de me tutoyer Jashin !

Un soupir lui échappa. Mais son sourire s’accentua. Hum..Je ne comprenais pas vraiment ses réactions. Alors la brume et le froid avait été créés volontairement d’après ses dires. Non, c’était du bluff ! Créér du froid, ce n’était tout simplement pas réalisable !

- Ca t’étonne ?

Il avait malicieusement accentué sur le « t », comme pour m’agacer. Je me redressai et posai ma tête sur mes genoux, réfléchissant silencieusement. En quelques pas, il atteint la porte et sortit sans en dire plus. Quelle question…ça voulait aussi dire qu’il n’était pas étonné pas ce fait, lui. Moi, si. Ca relevait de l’incroyable. De l’irréalisable. Ici, je ne tremblais plus de froid. Je me relevai et atteignit la fenêtre où les rideaux étaient tirés. Je saisis le tissu poussiéreux et le fit coulisser. La ville endormie. Le silence total. Et surtout, aucun signe de brouillard. Les lampadaires étaient de nouveau allumés, comme si rien ne s’était passé. Je tirai le rideau, frustrée de ne pas comprendre.

Après une heure d’élucubrations sur l’étrange fait, je décidai de descendre avec mes parents. Enfin, j’espérais ne pas croiser « Jashin », mais peut être était-ce trop demander. Je remis ma veste et descendit les escaliers de bois quatre à quatre. Mon père était assis en face de ma mère. Et bien sûr, il était à côté d’eux, prenant part à leur discussion. En me rapprochant un peu, je pus entendre qu’il leur décrivait un petit raccourci, désignant la carte de voyage de mes parents. Hum. Il se moquait vraiment de moi ? Il m’avait pourtant dit ne pas être d’ici lorsque je lui avais demandé la route ! Bon, je n’arrivais pas à le comprendre dès le début, alors je fis mine de ne pas être vexée. Comme attendu, ma mère tourna la tête vers moi avec un air agacé.

- Ayame, qu’est ce que tu fais ici ? Tu devrais remonter dormir !
- Je vois que ça vous réjouit de me voir debout.

J’avais répliqué avec un petit air ironique. Enfin, on avait l’habitude. Et Jashin continuait de me fixer. Il ne voyait pas que ça me rendait mal à l’aise ? Je me sentais constamment observée. Je l’aurais bien assimilé à un chat annalisant sa future proie. Mieux vallait l’ignorer. Je m’assis avec eux, sans vraiment écouter ce qu’ils disaient. De toute façon, ils parlaient d’itinéraires et de froid. Ma main droite soutenait ma tête fatiguée. Mais je ne voulais pas remonter à l’étage des chambres. Finalement, Will et Holly finirent par sortir de table, et me dirent de monter quand je serais fatiguée. Je l’étais déjà, mais ça me tracassait tellement que je voulais savoir ce que dirait Jashin. Il s’appuya sur le dossier et croisa les bras. La salle était quasi-vide, seuls quelques personnes discutaient dans un coin, autour d’une table. Je pris la parole la première.

- J’ai le droit de savoir, Jashin. Qu’est ce qui s’est passé exactement ?
- On se met tous en chasse. Et ce pour moi, comme pour eux. Reste près de moi.

Je n’obtins pas plus. En fait, je n’attendais pas vraiment plus de sa part. Et son sourire l’avait quitté, c’était en quelque sorte un signe de son changement d’attitude. Alors, Jashin parlait comme par énigmes. Je finirais par m’habituer de toute façon. Il se leva de sa chaise silencieusement, et sorti dehors. Rester près de lui ? Et son expression, « se mettre en chasse ». Qui étaient les chasseurs ? Et le gibier ? Était-ce moi ? Je me décidai enfin à aller dormir, en espérant que ce ne fut qu’un mauvais rêve. En vain.

Malgré l’épaisseur des rideaux, le soleil parvint à percer le tissu, pénétrant dans la petite pièce. Mes paupières clignèrent plusieurs fois avant de s’ouvrir. Sept heures et quelques. Je tirais la couverture et m’habillai en vitesse, avant de sortir de la chambre. Je descendis ensuite en bas, suivie de Jokeï, et je rejoignis mes parents. Nous nous mîmes enfin en route, vers la ferme de mes grands parents, empruntant le raccourci. Je ne tardis pas à apercevoir les lieux, le sourire aux lèvres. Les événements de la veille affluaient néanmoins, mais je préférai ne pas trop y penser. Adviendra qu’adviendra. Après avoir salué ma famille, je montai au grenier y déposer mes affaires, respirant l’air frais de la campagne. Je redescendis ensuite prévenir mes parents que je sortais. Et je me retrouvai enfin dehors, à gambader.

Le hameau n’avait pas vraiment changé. Les rares bâtisses avaient gardé leur apparence vieillote mais accueillante, surplombées par leur toît aux tuiles en mauvais état pour la plupart. Au loin, on apercevait les nombreux ballots de paille, et parfois des troupeaux de moutons. Je décidai d’opter vers le petit bois comme j’avais l’habitude de faire. Je savais qu’un fin cours d’eau y passait. J’avais apporté avec moi quelques Muffins, parce que je n’avais toujours pas déjeuné. Les sentiers du breuil épais étaient aussi chaoteux qu’avant, percés par de grosses racines, celles des feuillus qui longeaient les chemins. Après quelques minutes de marche, j’entendis le fameux ruissellement de l’eau. Je finis par apercevoir le cours d’eau clair, au bord duquel je m’assis en tailleur. Je méditais à nouveau. C’était un comique, ce Jashin. Il voulait que je reste près de lui, c’était bien beau mais si il s’éclipsait à chaque fois…Je ne pouvais pas faire grand chose non plus. Je tendis la main vers la surface de l’onde fraîche, décrivant de fins sillons dans l’eau. Une étrange sensation me prit. J’avais l’indésirable impression que l’eau devenait de plus en plus froide. Je retirai vivement ma main du liquide glacé, horrifiée. Je reculai un peu, comme pour prendre de la distance. Mes yeux observaient la surface veloutée de la rivière, sourcils froncés. Je restais incrédule.

- Bouh.

Je fis volte-face le plus vite possible, tellement que j’en trébuchai. Je voulus me rattraper mais ce fut trop tard, et la moitié de mon corps fut plongé dans l’eau plus que froide. La rage consumait déjà mes iris lorsque je fis cette chute, et elle ne fit que s’accentuer lorsque je découvris Jashin debout devant moi, observant ma silhouette piteuse d’un air amusé.

- Hors de ma vue espèce de sadique !

Sans répondre, il attrapa mon bras gauche avec force et me sortit de l’eau. J’avais les vêtements trempés et un curieux désir de le tuer sur place.

- C’est regrettable. Tu as froid ?
- Très drôle. Vous vous moquez de moi ?
- Jamais.

Il avait de la chance que je ne sois pas en possession d’une arme quelconque, je l’aurais réellement étripé. Je n’avais plus qu’à rentrer à la ferme me changer. Nous avions beau être en été, et le soleil était là, il y avait tout de même une fraîcheur qui me glaçait les os. Il avait l’air de bien s’amuser. Il retira sa veste et me la tendit. Il était juste impossible. Je la saisis avec frustration et la jetai sur mes épaules tremblantes.

- Jashin, je n’arrive décidément pas à vous cerner.
- Mieux vaut ne pas essayer. Je suppose que tu as testé toi-même que l’eau est anormalement froide ?
- …C’est vrai…Je voudrais savoir, qui sont les chasseurs, et qui est le chassé ?
- Les chasseurs sont responsables de cette température. Et, tu es « le chassé ».
- Pourquoi ? Je ne vous connais même pas ! Vous avez l’air de tout savoir de moi !
- J’ai une mission Ayame. Une mission que je me suis donné seul. Elle a pour but de te protéger.
- Vous voulez me protéger ? Mais de quoi ?
- De la mauvaise voie. Celle qui pourrait plonger le monde dans une fausse utopie.

J’avais l’indésirable impression d’être tombée sur un fou. Mais je n’arrivais pas à me dire que ses paroles étaient des mensonges. Jashin avait pourtant l’air sérieux sur ce qu’il me disait. Et après tout, il répondait à mes questions. Je comprenais la moitié de ce qu’il racontait. « Une fausse utopie » ? Et c’était censé signifier quoi ?

- Euh…ça vous est déjà arrivé de vous expliquer plus..clairement ?
- A vrai dire, non.
- Il va bien falloir, parce que je ne comprends absolument pas de quoi vous parlez.
- Tu finiras bien par comprendre de toute façon.
- Qui êtes-vous ?

J’avais posé cette question à la volée, piochant dans toutes les autres. Je ne connaissais rien de son identité, hormis ce « Jashin ». Assez spécial comme prénom d’ailleurs…Le Dieu maléfique Japonais. Après tout, je ne m’attendais plus à grand-chose de sa part, tout de lui était étrange. J’avais beau dire ces mots, il me surprendrait encore et encore. Il fixait le vide. Il réfléchissait ? C’était si compliqué que ça de répondre ? Plus je lui parlais, plus je l’analysais, et plus je le classais comme un être « à part ». Et ce petit sourire qu’il conservait constamment, c’était plutôt stressant. Il ne s’en rendait peut être pas compte, mais il avait une tête de psychopathe.

- Alors, tu veux savoir qui je suis. Apparemment « Jashin » ne te suffit pas.
- Ce n’est pas le genre de choses dont je me contente, hum…
- Il va bien falloir que je t’explique clairement la situation de toute façon, alors autant que je me jette à l’eau. Décris-moi le monde dans lequel tu vis.
- Euh…Je vis sur Terre je précise. Bah on sait jamais hein…Il y a plusieurs pays avec des présidents. Enfin pas partout ! Et…Je dirais que le « truc » principal c’est la consommation. Après…Je suis banale, je fais mes études comme tout le monde. Quoique pas tout le monde en fait..
- C’est bon, ça suffira. Le monde d’aujourd’hui est déplorable on dirait…Personnellement, je l’observe chaque jour, mais je ne puis m’empêcher de remarquer qu’il est bien triste décrit par quelqu’un d’autre que moi.
- Comment ça ? Vous l’observez tous les jours ? Entièrement ?
- De façon brève si tu préfères…Avec ma propre vision des choses. Mais il faut que tu saches qu’ici, personne n’est banal. Et toi un peu plus que les autres si je puis me permettre. Je ne suis pas le seul à avoir une mission ici. Tu dois te mettre dans le crâne que tu es en danger. N’essaie pas de savoir pourquoi pour l’instant, mais ne retourne pas à la ferme de ta famille. Si tu es mets un pied, je serais obligé d’intervenir. Et je ne me retiendrais pas s’il faut que tu m’obéisses.
- Je crois que je n’ai pas tout compris là…Je suis censée vous écouter ? Et ma famille ? Je ne vais pas partir comme ça vous êtes malade !

Jashin ne sourcilla pas. Il posait sur moi un regard plus noir que le noir lui-même. Là, il me faisait réellement stresser. Il était quoi au juste ? C’était peut être un fou..Un échappé…Un ancien taulard…Non, mieux vallait ne pas y penser, car si c’était le cas, j’étais vraiment en danger comme il l’avait dit. Néanmoins, je n’arrivais pas à ne pas lui faire confiance. Il y avait quelque chose dans ses prunelles écarlates qui agissait constamment sur moi, comme me dictant des ordres que j’allais suivre à la lettre, que je le veuille ou non. Il avait dit que si je ne l’écoutais pas, il agirait. Des menaces ? Il pensait réellement que j’allais le croire rien qu’avec ça ? Je réfléchis rapidement, m’imaginant quelques scénarios possibles sur le fait de son refus à ce que je retourne chez mes grands-parents. Y avait-il un rapport quelconque avec ces mystérieux « chasseurs » ? C’était tout à fait possible. Il se passait même peut être quelque chose là-bas, alors que j’étais occupée à en débattre avec le soi-disant britannique. Il conservait un silence incroyable, de tel que j’avais du mal à percevoir le son de sa respiration. Mais je sentais son regard. Et il n’avait pas vraiment l’air de plaisanter. Pourquoi il me racontait tout ça ? Et au final, il n’avait pas répondu à ma question…Une fois de plus. Je repris la parole, et j’étais fermement décidée à obtenir une réponse correcte de sa part.

- Pourquoi ne voulez-vous pas que je retourne là-bas ? Il se passe quelque chose que je ne suis pas censée voir peut être ? Ou ça vous déplait ?
- Parmis tes différents souhaits, y a-t-il celui de voir mourir vos parents ?
- Co..Comment ?

J’espérais réellement ne pas avoir tout compris. Qu’est ce que ça voulait dire ? Que si je retournais au hameau, je verrais mes parents…mourir ? Non, c’était juste impensable. Jashin dut lire la marée de questions dans mes yeux verts, car il m’éclaircit un peu plus.

- A l’heure où nous parlons, il se passe déjà quelque chose. Tu te souviens des chasseurs je suppose ? Enfin, je ne peux pas vraiment te questionner sur eux vu que tu ne sais pas qui ils sont. Ils sont à ta recherche comme tu as pu le déduire.
- Mais que je reste ici ou que j’aille à la ferme ne changera rien ! Ils ont bien réussi à me trouver alors que j’étais dans Whisterfine, non ?!
- Ils ne savent pas te localiser quand je suis à côté de toi.
- Alors venez avec moi là-bas ! Et vous qui êtes si malin, vous pourriez bien faire quelque chose pour m’aider non ?
- Je ne bougerais pas d’ici, et toi avec moi.
- Et je ne vous obéirais pas, Jashin.
- Soit.

Sans attendre une autre réaction de sa part, je fis volte-face et détalai en direction de la demeure de mes grands-parents. Si il me racontait la vérité, alors mieux vallait que je ne traine pas. Je sais qu’arrivée sur place, je ne pourrais pas faire grand-chose, mais j’avais besoin d’en avoir le cœur net. Cette fois, je saurais si j’ai le droit de me fier à cet homme qui me dicte mes actes.
Les quelques bâtisses du hameau me parurent soudainement effrayantes. Penchées sur ma course dans leur effritement rieur, leur visage de briques brunes se fissurait malicieusement, sous leurs yeux fermés d’un bonheur malsain. Leur chapeau de tuileries projetait une ombre obstinée sur mes pas. J’aperçus vite le lieu d’arrivée, où tout semblait plus calme que jamais. Je lui en voulus à cet instant, je lui en voulus d’avoir menti. Que pensait-il de moi ? Il me testait ? Il observait mes réactions, comme celles d’un vulgaire cobaye prisonnier de sa cage, et obligé d’accomplir les ordres donnés sous peine d’obtenir mécontentement de son tuteur. J’étais frustrée. Je poussai la vieille porte de bois dans le dessein de me changer. Oui, j’étais encore trempée. Je ne sais pas ce qui me poussa à entrer dans la salle à manger. Ma main se posa sur la poignée en fer forgé, et la porte s’entrebailla, assez pour me laisser passer. Il y avait là un homme. Un homme que je ne connaissais pas, et qui était tranquillement assis à la table, me tournant le dos. Il était entièrement vêtu de bleu marine, portant une veste de cuir et un jean simple. Ses cheveux étaient assez courts, bruns. Et surtout, le silence était maitre, pesant. Juste le « tic-tac » régulier de la grosse pendule au milieu du papier peint beige. Non, je ne pouvais pas lui parler, c’était absurde ! Je ne savais pas quoi faire, pas comment réagir face à cette situation. Un invité ? Un ami de mes grands-parents, peut être…Je tendis le cou, tentant d’apercevoir légèrement son visage. Mon cœur se mit à battre encore plus vite lorsque j’aperçus le morceau de tissu noir recouvrant le bas de son visage. Un voleur ? Non, il se serait déjà sauvé en me voyant entrer.

- Tu cherches quelque chose en particulier ?

Il avait parlé. Tout mon être s’était vigé de stupeur. Sa voix n’était ni chaleureuse ni glaciale.
Elle était tout simplement vide d’émotions. J’étais officiellement « chez moi », et il me demandait ce que je cherchais. J’étais tombée dans un monde de fous. Je sursautai de nouveau lorsqu’il se leva brusquement de la chaise, qui émit un grincement sur le carrelage. Il pivota vers moi et saisit ma gorge avec force. Je n’avais aucune idée de comment réagir. Je sentais ma respiration s’affaiblir sous le regard impassible de l’inconnu. J’avais l’impression qu’il ne bougerait pour rien au monde, et que son bras était fait d’acier face à ma petite silouhette temblante. Pourquoi Jashin n’était jamais là quand on avait besoin de lui ?

- Hey, calme-toi deux minutes.

Mon assaillant tourna la tête vers l’escalier qui menait au grenier. Il y avait là une autre
personne, et d’après sa corpulence, c’était une femme cette fois-ci. Néanmoins, elle était vêtue comme l’autre. Du bleu marine, et un tissu sur le bas du visage. Elle portait une queue de cheval haute, et ses cheveux étaient de la même couleur que ceux de l’homme qui, à présent, m’avait lâchée. Je portai mes deux mains à mon cou, couvrant la douleur, et tentant de reprendre un souffle normal.

- Tu vois bien que ce n’est qu’une gamine…
- Ils ont quand même dit qu’il fallait faire attention.
- Ce n’est pas à elle que nous devons faire attention…

Je les laissai débattre ensemble, et observai mon entourage. Sur la table, il y avait les restes
d’un petit déjeuner et…Un couteau. Le type s’était un peu éloigné de moi. Je saisis l’arme improvisée sans réfléchir, et la glissai dans ma manche. La manche du manteau de Jashin, plutôt. La femme détourna son attention de l’homme, et s’approcha de moi. Elle avait une démarche souple, et une carrure fine. Mieux vallait faire attention, elle devait être assez rapide…Arrivée à ma hauteur, elle saisit mon poignet, attrapant le tissus noir de la longue veste. Elle s’adressa à son coéquipier, puis à moi.

- Tiens donc ! Elle l’a déjà rencontré apparemment. D’où vient ce manteau ?
- Je n’ai aucune réponse à vous donner ! Sortez de chez moi !

Malgré le fait que je ne voyais que la moitié de son visage, je pus deviner qu’elle sourit. Ce
ne devait pas être un sourire sincère. Son « collègue », lui, ne se retint pas de rire. Je serrai les dents. Si j’avais les moyens de les faire sortir d’ici, ce serait déjà fait.

- Où est ma famille ?
- Ils sont hors d’état de nuire à nos affaires. Mais ils ne sont pas morts, ne t’inquiète pas. Maintenant, tu vas venir avec nous, compris ?
- Non, elle vient avec moi.

Ma tête se tourna vers la porte de la grande pièce, en même temps que les deux autres.
Jashin était là, debout dans l’entrebaillement. Il observait les deux êtres vêtus de bleu foncé avec une certaine colère au fond des yeux. Je sentis la main de la femme trembler sur mon poignet au fur et à mesure qu’il se rapprochait de nous. Elle finit par lâcher prise, et fit quelques pas en arrière. L’homme, lui, ne bougeait plus. Il tenait la rampe de l’escalier, analysant la situation. Jashin posa une main sur mon épaule et tendit la main devant moi, attendant quelque chose. Je crois que je compris tout de suite ce qu’il demandait, puisqu’il me sourit lorsque je déposai le couteau dans sa main. Il saisit ce dernier par la lame, et fit un pas en direction de l’homme. Plus personne ne parlait, le silence était presque total, seul l’horrible glas de la pendule et les respirations saccadées de mes assaillants le ponctuaient. C’est mon « sauveur » qui prit la parole en premier, s’adressant à l’homme.

- Dis-moi, que ferait ce couteau sur ta chair ?
- Vous ne pouvez pas ! Vous savez aussi bien que nous ce qui se passerait si vous faites ça ! Seigneur Jashin, vous ne le feriez jamais.

C’est la femme qui avait répondu à la place de son collègue. Son ton était un peu trop
ironique à mon goût. Pourquoi Jashin ne pouvait pas faire ça ? C’était un meurtre, mais…C’était de la légitime défense ! Et ce « Seigneur ». Elle avait l’air de bien s’y connaitre elle aussi. Jashin ne la regarda pas, il se contenta de lui répondre d’une voix simple.

- Tu crois ?

Il esquissa un rapide mouvement, et le couteau fonça à une vitesse folle en direction de la
femme, qui n’eut pas le temps de bouger d’un pouce. Il se ficha dans le mur, juste derrière elle, qui était devenue plus que blanche. Ses yeux étaient révulsés, et elle respirait avec peine. L’homme monta deux marches à reculons. Ils avaient si peur que ça ? Au moins, il ne s’attaqueront plus à moi ces deux-là…Du moins, je l’espérais. Jashin déclara à l’intention des deux personnes :

- C’est dans votre tête qu’il se plantera si vous la touchez encore. C’est clair ?
- Nous exécutons les ordres ! Rien de plus ! Ce n’est pas à nous qu’il faut dire ça !
- Néanmoins, vous semblez les exécuter avec enthousiasme. Hors de ma vue.

Lui obéissant, ils s’éclipsèrent de la ferme avec hâte, emportant avec eux leur cuisante
défaite. Il y eut un instant de silence. Jashin ne m’avait pas totalement menti à propos de ce qu’il se passait ici. Il se tourna vers moi, comme pour attendre mes habituelles questions. Il ne patienta pas longtemps.

- Où est ma famille ?
- Ils n’ont rien, ne t’inquiète pas pour eux. Ils sont juste dans un sommeil provisoire.
- Ce sont eux, les chasseurs.. ?
- Bien deviné.
- Pourquoi vous ont-ils appelé.. « Seigneur » ?
- Bon. Ecoute moi Ayame. Tu vas devoir me suivre, et me faire confiance, c’est d’accord ?
- Je veux bien faire ça mais…J’apprécierais également que tu répondes à mes questions.
- Ils m’appellent ainsi car je suis en quelque sorte leur supérieur, même si ce n’est pas moi qui leur donne ces ordres.

Je pus apercevoir son petit sourire de satisfaction quand je le tutoyai. Leur supérieur, d’accord, mais Seigneur, c’était un peu grand à mes yeux. Il me cachait encore beaucoup de choses, c’était certain. Je retirai sa grande veste et lui tendit. Il la reprit sans broncher, et je continuai à le questionner. J’avais besoin de savoir tout maintenant. J’étais réellement en danger, cette fois, et j’en avais eu le cœur net.

- Pourquoi est ce qu’ils me cherchent ?
- Je vais t’expliquer comme il me convient de le faire, alors garde tes questions. Je vais te raconter quelque chose, et je ne veux pas que tu me coupes la parole, c’est compris ? Et autre chose, c’est à toi de décider de me croire. Assieds-toi.
- Ok ok…

Il prit place en face de moi, et posa ses bras sur la table. Il devait profiter que ma famille
était « hors d’état de nuire » pour me parler ici. Il n’y avait plus de danger que les mystérieux chasseurs reviennent, du moins, pour l’instant. Jashin posa son regard ténébreux sur le mien, et commença son récit. Je ne bougeais pas, face à lui, et décidai de l’écouter avec attention.

- Il n’existe pas qu’un seul Monde ici. Il y en a exactement quatre. Celui dans lequel tu vis, nous le nommons « Origine ». Nous sommes actuellement sur Origine. Ici, les êtres vivants sont des prisonniers. Vous passez une vie morne, monotone, et…vous vivez dans une souffrance assez particulière. Vos moyens mis en place pour passer le temps sont faits de matière brute. Et, la première façon de s’occuper, c’est la guerre et les complots. Nous avons l’habitude de nommer vos conflits les « Guerres Matière ». C’est un Monde qui a totalement dégénéré, et je sais que beaucoup s’en rendent compte. Vous êtes tous en train de passer un test, quelque chose qui doit vous forger.
Le deuxième Monde, c’est celui de la seconde vie. Nous le nommons « Espérance ». C’est ici que vont les âmes des morts. La matière existe toujours, elle est simplement plus évoluée et moins concrète. Sur Espérance, nous avons tous appris à nous servir de cette matière. Et, comme tu dois le savoir, ce nouvel art est désigné par le mot « Magie ». Nous pratiquons la Magie. Nous l’exerçons chaque jour. Sur Origine, vous n’êtes tout simplement pas assez évolués mentalement pour oser l’interpréter comme elle est. Sur Espérance, les conflits ont leur place. Les complots aussi. Ces choses sont inévitables. Elles font partie de la pensée originelle, c'est-à-dire la pensée de notre première vie sur Origine. Les conflits sont nommés « Guerres Irréelles ». Ils pèsent lourd par nos temps.
Les deux autres Mondes font partie d’Espérance, ce sont des Sous-Lieux. Il y a pour commencer Cieux, qui porte comme autre nom la Cité des Dieux, puis Faux Néant, qui est couramment appelée la Faille des Dieux Déchus. C’est l’endroit que nous craignons tous. Moi compris…Les Âmes y sont jetées à la fin de la deuxième vie. Pour finir la deuxième vie, il faut juste mourir une deuxième fois : se tuer ou être tué. Certains y sont déjà tombés par mégarde. Le grand gardien de la Faille est la Mort. C’est le seul qui décide des entrées et des sorties. C’est assez pratique, si tu souhaites savoir si quelqu’un est mort, il suffit de lui demander.
A présent, personne ici n’est censé connaitre l’existence de ces Mondes avant de décéder. Tu fais partie des très rares humains qui sont au courant désormais. Sur Espérance, les Guerres Irréelles sont d’une très grande importance. Chaque millénaire, une grande guerre a lieu. Et chaque millénaire, un prophète nait. Désormais, ça fait seize ans qu’elle est née. C’est une prophète. Elle est en face de moi.
- ...Euh…Ouah…Si je comprends bien, je dois faire rentrer tout ça dans ma tête et le croire ? Comme ça, sans preuves ?
- Tu voudrais une preuve ? Laquelle ?
- Je ne sais pas…Montre-moi la « Magie », par exemple…

J’étais complètement bouleversée par sa déclaration. C’était tellement invraisemblable que j’avais peine à tout croire. Et pourtant, il restait sérieux. Et si jamais tout était vrai ? Si je vivais vraiment sur Origine, le premier Monde, si j’étais…une prophète ? La Magie existerait ! Je devais dire que ça ne me déplaisait pas du tout…Au contraire même. Mes yeux verts pétillaient, j’avais tout à coup une soif d’apprendre qui ne me ressemblait pas. Jashin avait l’air satisfait de ma réaction. Très satisfait même. J’avais décidé de l’écouter dans tout ce qu’il dirait. Allait-il me donner cette preuve ? Allait-il faire de la « Magie » ? Mon pouls s’accélérait à chaque seconde, et je le fixai avec attention. Il finit par remonter sa manche droite, et éloigner son bras de la table de bois. Sans bouger, il fit apparaitre par je ne sais quel moyen une petite flamme dansant au creux de sa paume. Elle semblait ne jamais vouloir s’éteindre, et sa lueur orangée persistait sous mes iris figés. Je restais face à lui, sans savoir quoi dire. Il finit par la faire disparaitre, la laissant s’évanouir dans l’air, partant en fumée. Le silence se fit pesant. J’étais trop étonnée par ce que je venais de voir pour oser dire quelque chose. Était-ce un vulgaire tour ? Ou était-ce vraiment une flamme de sa propre création ? Si c’était le cas, cet acte était tout simplement…incroyable. J’aperçus son air amusé face à mon expression. Je me décidai à dire quelque chose.

- Tu as fait ça tout seul ? Comment ? C’est génial !
- C’est la Magie. Tu m’as toi-même demandé une preuve sur ça. Tu voudrais savoir en faire autant ? Ca arrivera. Ton destin le prédit, de toute façon.
- Comment..ça veut dire que je vais faire ça moi aussi ?
- Tu es la prophète, Ayame ! Tu dois savoir tout ça. Tu dois le contrôler. La matière d’Espérance est favorable aux entrainements.
- Mais alors…Je vais devoir aller sur Espérance ?
- Tu as tout compris.
- C’est…Ouah…J’ai du mal à réaliser tout ça en fait…
- C’est compréhensible. Et c’est une réaction normale.
- Je crois que j’ai compris ! Les chasseurs ont vraiment crée le froid alors ! C’est leur Magie ?
- C’est tout à fait ça. Malgré leur attitude hostile envers toi, je sais qu’ils ne te tueraient jamais. Leur but est plus de te capturer que de te porter préjudice.
- Je vois…Mais, quand ils étaient là, la femme était sure que tu n’allais pas les tuer. Pourquoi.. ?
- Je suis désolé mais je ne veux pas en dire plus sur moi pour le moment.
- D’accord…Mais, si je vais là-bas, mes parents vont s’inquiéter, non ?
- Je ne peux pas t’aider là-dessus.
- Qu’est ce que je vais leur dire ?! Je ne peux pas partir comme ça !
- Je suis sûr que tu peux avoir un peu d’imagination quand tu veux.

Il me sourit et se leva enfin. Je tirai également ma chaise. Il enfila son long manteau noir et prit la direction de la sortie. J’étais à la fois soulagée et pertubée de la situation. Je n’étais plus une fille banale, et quelque part, ça me plaisait énormément. Il me lança un de ses regards impossibles à déchiffrer et dit ses derniers mots.

- Je viens te chercher Jeudi prochain, à treize heures.
- Jeudi ?!

Il ne dit rien, et sortit de la ferme sans me prêter attention une seconde de plus. Il ne comptait plus vraiment me répondre. La tranquilité reprit possession des lieux, offrant un paysage de fin de matinée calme. L’air sentait le foin, et la campagne. Jeudi…C’est beaucoup trop tôt. Il fallait que je trouve quelque chose à inventer, c’était primordial. Je montai quatre à quatre les escaliers du grenier, et sautai sur mon lit défait. Je venais de vivre quelque chose de très spécial. J’avais à la fois peur d’aller dans cet autre Monde, et à la fois une terrible envie de quitter cette vie banale. Mais je devais m’attendre à tout. En allant sur Espérance, je courrai aussi un grand danger. Les chasseurs qui m’avaient localisée dans Wistherfine n’étaient pas des novices, c’était sur. Provoquer une telle température pendant un certain temps sur « Origine » ne devait pas être si facile que ça. Jashin avait dit lui-même que la manipulation de la matière était plus aisée sur Espérance. A présent, je devais m’attendre à tout. Pendant la période de vacances, ça ne devait pas être bien difficile d’aller sur Espérance, mais en période scolaire…C’était autre chose. Il me fallait une idée. Je ne pourrais pas m’éclipser comme ça à chaque fois, ça finirait par être bizarre. Ni prétexter d’aller chez une amie, d’après le caractère de ma mère, ça ne serait pas très…compatible. Il fallait que j’invente quelque chose d’une certaine durée pour l’instant, et pour après…j’improviserais. Une colonie de vacances ? Une fausse colonie plutôt. Mieux vallait éviter de parler d’argent alors…Une place dans une colonie gagnée, pourquoi pas ? Oui, c’était plutôt pas mal comme idée ! Je n’aurais qu’à y rester une semaine et quelques. Restait à préparer l’espèce de papier justifiant ça…Ou pas. Je pense que mes parents me croiront.

- Aya ! Descends !
- J’arrive !

Ma mère…Je suppose qu’il viennent tous de se réveiller. C’était assez pratique comme truc en fait. Pratique dans le sens où on pouvait faire ce que l'on voulait sans avoir les parents derrière le dos...Je descendis les escaliers enfermés dans leur cage de poussière, et arrivai dans la salle à manger. Holly se tenait debout aux côtés de Will, affichant un air contrarié. Elle avait les bras croisés sur sa poitrine.

- On a du s'endormir sans s'en rendre compte...Il faut dire que nous sommes fatigués du
voyage !
- Maman, je peux te demander quelque chose..?
- Oui ?
- Eh bien, j'ai gagné une place dans une colonie de vacances en participant à un jeu sur le
Net, et...j'aimerais bien y aller...C'est gratuit quand même.
- Hum...ça se passe où ? Et quand ?
- Euh...A Cambridge ! Je dois prendre le train de Jeudi prochain à treize heures. Le ticket est
gratuit, j'ai juste à leur présenter le bon pour la place. Je voudrais tant aller à Cambridge !
Et je ne serais pas seule en plus.
- Will ? Qu'est ce que tu en penses ?
- D'ici Jeudi nous serons rentrés. Bah, ça se peut pas lui faire de mal ! C'est d'accord, Aya. Tu
voudras que je t'accompagne à la gare ? Et tu nous téléphoneras hein..
- Non non, ça ira ! Je prendrais le bus. Merci ! Je vous adore.

Sans attendre un quelconque changement d'avis, je retournai à l'étage. Parfait ! A treize heures, je ne serais plus dans ce Monde. Origine est bien triste ! Comment était Espérance ? Je m'imaginais déjà une magnifique et gigantesque cité flottant dans le ciel...Où il ne fait jamais gris et froid. Faut pas rêver...Mais Jashin avait bien dit que la matière était meilleure sur Espérance. Comment se sent-on face à la Magie ? Y a-t-il beaucoup d'apprentis là-bas ? Et si jamais je ne voulais plus retourner sur Origine...Me remémorant les paroles de Jashin, je me rappelai quelques-uns de ses mots. D'après lui, je faisais partie des rares personnes encore vivantes et connaissant l'existence des Mondes. Qui étaient ces autres personnes ? Et si je les avais déjà croisées sans m'en rendre compte ? Mais Origine est bien vaste. Comment sont les gens sur Espérance ? J'espère avoir un meilleur contact social avec les Espéranciens qu'ici...Hormis ma famille, rien ne me retenait sur cette terre désolée. J'étais trop impatiente de découvrir le deuxième Monde pour ne pas y penser. J'allais pratiquer de la Magie, c'était juste incroyable. Je me demandais déjà quelles sensations ça faisait de tenir du feu au creux de sa main. Et j'étais une prophète. Ce qui signifiait qu j'avais une importance capitale pour énormément de monde sur Espérance. Je serais aussi la cible numéro un pour de nombreuses autres. Je trépignai déjà d'impatience. Je voulais que Jashin me raconte tout sur ce Monde inconnu, et qu'il me dise aussi qui il était vraiment. Mais les conflits me faisaient déjà trembler. J'avais vu de nombreux films Américains où les gens pratiquaient de la Magie, et ça ne se finissait pas toujours en grande joie. Il y avait des morts. Et ça serait même peut être pire en vrai. Dans les films, le héros gagne toujours, ou presque. Mais là, c'est moi qui sera confrontée aux "méchants". Durant tout le séjour chez mes grands parents, je ne fis que penser aux évènements qui allaient se passer. Il n'y avait dans ma tête que des questions concernant Espérance, Cieux, et Faux Néant. Jeudi arriva plus vite que prévu.





It Was The First Chapter Cool
Comments ?

Revenir en haut Aller en bas
Black Moon

Black Moon

Journaliste of sweet paradise ;
Berlingot très très rigolo


- MESSAGES : 564
- DATE D'INSCRIPTION : 25/09/2010
- AGE : 28
- LOCALISATION : Belgium

Papiers
- TEAM: Nounours Powa
- PROFS, ELEVES:
- RELATIONS:
• A Deux Pas de l'Enfer • Vide
MessageSujet: Re: • A Deux Pas de l'Enfer •   • A Deux Pas de l'Enfer • EmptyDim 23 Jan - 0:07

Hellow,
ça à l'air long et très bien. Dès que j'aurais le temps et de l'encre xP je l'imprimerais pour le lire parce que j'ai pas trop le temps sur l'ordi.
Revenir en haut Aller en bas
http://storm-center.forumactif.org/
Nightmare

Nightmare

Caramel qui colle aux dents


- MESSAGES : 146
- DATE D'INSCRIPTION : 10/01/2011
- AGE : 28

Papiers
- TEAM:
- PROFS, ELEVES:
- RELATIONS:
• A Deux Pas de l'Enfer • Vide
MessageSujet: Re: • A Deux Pas de l'Enfer •   • A Deux Pas de l'Enfer • EmptyDim 23 Jan - 0:09

J'ai commencé à lire les premiers paragraphes, tu écris bien!
Revenir en haut Aller en bas
Le Jokker

Le Jokker

Réglisse qui glisse


- MESSAGES : 365
- DATE D'INSCRIPTION : 16/01/2011
- AGE : 28
- LOCALISATION : Zbeum :3 Bobo la tête >0<
- HUMEUR : M. ? Save me.

Papiers
- TEAM: Nounours :3
- PROFS, ELEVES: Pleins de p'tits n'élèves
- RELATIONS:
• A Deux Pas de l'Enfer • Vide
MessageSujet: Re: • A Deux Pas de l'Enfer •   • A Deux Pas de l'Enfer • EmptyDim 23 Jan - 0:33

Merci. ♥️
C'est long je sais ! Razz
Revenir en haut Aller en bas
pouloulou

pouloulou

Berlingot très très rigolo


- MESSAGES : 213
- DATE D'INSCRIPTION : 15/01/2011
- AGE : 26
- LOCALISATION : devant l'ordi x]
- HUMEUR : top cool

Papiers
- TEAM: Draibus en force !
- PROFS, ELEVES: ♥ Ma soufry ♥
- RELATIONS:
• A Deux Pas de l'Enfer • Vide
MessageSujet: Re: • A Deux Pas de l'Enfer •   • A Deux Pas de l'Enfer • EmptyDim 13 Fév - 6:39

j'ai tout lu !!!Je suis tout simplement Fan, c'est trop bien écris, c'est trop bien !me tarde trop la suite !!
Revenir en haut Aller en bas
Le Jokker

Le Jokker

Réglisse qui glisse


- MESSAGES : 365
- DATE D'INSCRIPTION : 16/01/2011
- AGE : 28
- LOCALISATION : Zbeum :3 Bobo la tête >0<
- HUMEUR : M. ? Save me.

Papiers
- TEAM: Nounours :3
- PROFS, ELEVES: Pleins de p'tits n'élèves
- RELATIONS:
• A Deux Pas de l'Enfer • Vide
MessageSujet: Re: • A Deux Pas de l'Enfer •   • A Deux Pas de l'Enfer • EmptyMer 16 Fév - 1:34

Ooooh Merci d'avoir tout lu, franchement merci ! ♥️
Pour la peine voilà la suite Razz


II. Deuxième Chapitre - Aussi lourd qu'un ciel d'Automne

La rue défilait à vive allure, plus vite que ma démarche habituelle. Les voitures allaient, nombreuses, laissant une trace grisâtre à chaque passage. La chaussée était bruyante, et tous les auvents des petits pubs étaient tirés sur les larges trottoirs, prenant dans leur ombre les tables de plastique blanc auxquelles étaient accoudés des personnes. L'été se sentait partout, dans l'air et dans le sol, la chaleur empreignait chaque parcelle de terrain. Au dessus des routes, l'air était troublé, mais le ciel était d'un bleu pur qu'ancun nuage ne venait trancher. Il faisait beau. Et assez chaud. J'étais en route vers l'arrêt de bus. En fait, je ne savais pas vraiment où aller, alors j'avançais simplement. Jashin ne m'avait pas donné de lieu précis où je pourrais le rencontrer, je suppose que c'est lui qui viendra vers moi à l'heure dite. J'avais attaché mes cheveux châtains clairs en une queue de cheval haute, avait enfilé un débardeur noir et un slim blanc en vitesse. Pour ne pas interroger ma mère, j'avais quand même jeté quelques affaires dans un petit sac de voyage. Je regardai ma montre avec impatience. Il était exactement midi cinquante six. Normalement, dans quatre minutes, je verrai Jashin. J'eus soudainement peur que tout ça ne fut qu'un canular, mais la vision de la magnifique flamme dans sa main me rassura. J'aperçus un petit parc, ou plutôt un carré de verdure, où étaient plantés quelques bancs. Je me posai là, mon sac à mes pieds, et attendit les quelques minutes restantes. Je fixai le vide lorsque je sentis une présence à ma gauche, et quelqu'un s'assis à côté de moi. Je tournai rapidement la tête. Jashin était là, vêtu de son habituel manteau noir lui arrivant jusqu'aux pieds. Il avait également gardé son chapeau classique. Ses bras étaient croisés sur sa poitrine, et sa tête était baissée. Des mèches retombaient devant ses yeux pourpres que je ne distinguai pas de suite.

- Bonjour, Ayame.
- Bonjour Jashin ! Contente de te revoir. Tu n'es pas du genre à arriver en retard on
dirait..Mais, tu n'aurais pas un peu chaud..?
- Non, j'ai froid.
- Euh...Bon. Alors, comment je peux me rendre là-bas ?
- Pour le moment, je vais t'y emmener jusqu'à ce que tu apprennes comment faire de toi
même. Il te suffit de garder un contact avec moi et de fermer les yeux.

Je fis ce qu'il me dit sans broncher. Mon pouls s'était rapidement accéléré. J'allais enfin mettre les pieds sur Espérance. Je devais m'attendre à tout en arrivant là-bas, les habitants y pratiquaient la magie...Je sentis de forts picotements dans tout le corps, qui s'accentuèrent à la tête. Puis ce fut le noir total, la lumière disparut entièrement. Elle réaparut après quelques secondes, pour se faire douce et accueillante. Le silence se rompit et j'entendis quelques voix. Je sus que l'endroit était grand et assez vide, car il y avait de l'écho. Je me décidai enfin à ouvrir les yeux. Nous étions dans une grande salle au plafond très haut. Le sol était entièrement fait d'un carrelage beige et blanc qui semblait très bien ciré, de tel qu'on voyait presque notre reflet dedans. C'était certainement du marbre. Le bruit des pas résonnait. Les murs étaient faits de gigantesques vitraux sans rideaux, placés dans une armature dorée et minutieusement gravée. Le plafond était rond et lisse, entièrement blanc. Au fond de la salle, je pus apercevoir de nombreuses portes de bois lui aussi...lisse. De petites plaques dorées étaient placées sur chaque porte, où quelque chose était certainement écrit. Au milieu de la pièce, il y avait des bureaux installés en rond, derrière lesquels des personnes étaient occupés à fouiller des dossiers. Jashin avança jusqu'à eux, et attendit qu'on lève la tête vers lui. Un vieil homme leva les yeux de son dossier et retint une exclamation lorsqu'il vit Jashin. Il s'adressa à lui puis tourna la tête vers moi.

- Oh, pardonnez-moi, je ne vous avais pas vu ! Bonjour à vous, Seigneur Jashin. Et..?
- Elle s'appelle Ayame. Je suis ici afin de l'inscrire à la grande académie.
- Oh, bien sûr. Je pourrais avoir tous les renseignements sur elle ?
- Son nom est Klein, elle a désormais seize ans. Elle vient d'Origine et en est à sa première
vie. Elle n'a jamais mis les pieds ici et doit apprendre la Magie puisqu'elle est la prophète.
- La prophète ! Ca alors ! Oh, je ne m'y attendais pas ! Bienvenue parmis nous jeune porteuse
de Lumière.
- Je suppose qu'elle peut dès à présent se rendre à l'académie. Merci à vous.

Jashin attrappa mon bras et fit demi-tour. Il n'avait pas l'air d'apprécier beaucoup cette personne, à en juger par l’expression de marbrequ’il avait affichée. Il se dépécha de sortir de cet endroit trop bien lustré à mon goût, et me mena au dehors. Le ciel était aussi bleu que celui d'Origine. Alors c'était ça, Espérance. Une gigantesque cité s'offrait à ma vue ; il y avait de nombreux batiments qui s'étendaient vers le ciel, ils étaient principalement beiges. Les routes étaient faites de pavés gris soigneusement alignés, et surtout, je n'y vis aucune voiture ou autre moyen de transport. Néanmoins, il y avait des bâtisses semblant être des habitations, et d'autres ressemblant plus à des boutiques. Dans la rue, les passants me détaillaient étrangement. Ils étaient tous vêtus de vestes longues et fluides de différentes couleurs. J'en vis beaucoup qui avaient sur le dos des côtes de maille et même des épaulettes en ce qui paraissait être de l'acier. Des guerriers ? L'armée était-elle comme ça sur Espérance ? Si c'était le cas, alors toutes ces choses comme les pistolets et tanks n'existaient pas ici. Ca ne me déplaisait pas du tout. Sur mon passage, j'entendais des personnes adresser des "Bonjour", "Maître", "Seigneur" à l'intention de Jashin. Ils esquissaient de petits mouvements de tête à son intention, tandis que lui ne sourcillait pas et continuait sa route d'un pas déterminé. Saluer tous ces gens devait être lassant. Il semblait être quelqu'un de très connu, puisqu'on le saluait à chaque coin de rue. Chaque personne le reconnaissait. Ce n'était pas si difficile, car il était le seul à être vêtu de noir. Levant la tête vers le ciel, je détaillai la voûte céleste : par endroits, de grands morceaux de terre...volaient. Leur base parassait s’éffriter dans le ciel, et de nombreuses racines pendantes les reliaient entre eux. D'ici, j'apercevais quelques édifices dessus. Etais-je aussi sur un de ces imposants morceaux de terre lévitant dans l'air ? C'était tout à fait possible. Suivit de ma petite silhouette, Jashin entra dans ce qui semblait être un parc. Ce dernier était d'une beauté éblouissante : l'endroit était entièrement vert, parfois parsemé d'abondantes fleurs blanches et luisantes. Elle diffusaient leur effluve sucrée dans l'air ambiant. Le seul bruit était celui de l'eau, qui se divisait en de nombreux cours. De petits ponts pavés la surplombaient afin de fournir un passage plus aisé. Ce n'est que lorsque mon regard se posa sur mon guide que je perçus son léger malaise.

- Jashin ? Tu vas bien ?
- Je déteste vraiment cet endroit. Toutes ces fleurs et cette verdure je trouve ça...horrible.
- Comment ? Mais ce lieu est magnifique !
- Bon aller, dépêche-toi.

Comment pouvait-on émettre un jugement pareil sur cet endroit ? Il n'y avait de tel lieu sur Origine. C'était...magique. Pourtant, Jashin en avait l'air totalement dégoûté. Au fur et à mesure que je le cottoyais, j'en apprenait toujours d'avantage. Alors il n'était pas du genre à apprécier les collines verdoyantes et les petits oiseaux qui chantent. Aimait-il la pluie ? Je n'en avais aucune idée. Je finis par arriver devant ce qui me parut être un immense escalier de verre allant vers le ciel. Il avait l'air d'être infini, les marches transparentes se noyaient dans la fraicheur du ciel azuré. La seule personne que je connaissais ici posa un pied sur une marche à la surface lisse. Il fit un petit mouvement de tête à mon intention, m'indiquant de venir.

- Cet escalier mène à l'académie où tu pourras apprendre à te servir de la magie. Je suppose
que sa taille te décourage, non ? Je vais t'épargner ça, mais tu vas devoir apprendre à te
téléporter seule si tu ne veux pas avoir à le gravir. L'académie est sur le bloc le plus haut
d'Espérance.
- C'est sur...Merci.

Je posai ma main sur son bras, et il nous téléporta pour la deuxième fois. Les picotements revinrent, mais s'atténuèrent assez vite. Un immense édifice trônait devant moi. Il y avait comme une place devant lui, où siégeaient quelques fontaines bien élaborées. Le sol était fait de petites dalles marron clair, et un large escalier menait à son entrée. Je déduis par les nombreuses fenêtres trouant la façade qu'il y avait plusieurs étages. Il n'y avait personne dehors, juste le silence total. Y avait-il des vacances sur Espérance ? Je ne le savais pas encore. Jashin poussa la porte, dévoilant un couloir se séparant en deux parties. Ici aussi, les pas résonnaient. Mon guide ne disait rien, et je me contentais de le suivre silencieusement. J'avais presque l'impression de vivre un rêve. Il toqua à ce qui parut être un bureau, attendit le "entrez" et poussa la porte. Un vieil homme plutôt barbu était tranquillement assis dans un gros fauteuil mouelleux. En apercevant son interlocuteur, il se leva et esquissa une petite révérence.

- Je vous salue Seigneur Honoguraï. Vous désirez ?
- Bonjour à vous. Je vous amène une nouvelle étudiante.
- Aaah, la jeune Ayame je présume ? Bienvenue ici jeune fille. Je vous informe que les
horaires des classes sont les suivants : neuf heures à midi, puis quinze heures à dix-sept
heures trente du Hajime au Godome. Du Lundi au Vendredi sur Origine. Un dortoir vous sera
assigné, ces derniers sont au plus haut étage de l'académie. Vous pourrez commencer les
cours dès cet après-midi, voici votre classe. Les salles ne changent pas. Il se peut
simplement que vous changiez de terrain suivant les entrainements. Je vous ai assigné une
classe de votre niveau, c'est à dire débutant en Magie. Ah ! Et voici votre cape de magicien.

Le vieil homme me tendit d'abord un papier concernant les salles et contenant des informations utiles sur l'académie, puis une grande veste de soie bleue ciel. Des ailes d'ange étaient brodées dans le dos, en blanc. Une emblême, peut être ? Jashin le remercia, puis le salua. Je le suivis, sortant du bureau. Il monta jusqu'aux dortoirs, un long couloir longé de portes.

- Bon, à partir d'ici, je te laisse. J'ai de nombreuses affaires à régler. Bonne chance pour tes
cours de cet après-midi. Une dernière chose, la tunique et les bottes dans ton dortoir étaient
à ma soeur. Elle avait la même taille que toi, j'ai pensé que ça devrait t'aller. A bientôt.
- Merci ! A bientôt, oui…

Il se téléporta tout de suite après, laissant une épaisse brume noire s'évanouir dans l'air. Alors ça faisait comme ça quand il se téléportait..C'était plutôt étrange. Jashin avait une soeur ? Décidément, j'en découvrais des choses. J'entrai dans mon dortoir, et observai les lieux. C'était une chambre assez grande, où trônait un lit aux couvertures blanches qui balayaient presque le sol. Il y avait également une table de chevet, et une autre porte donnait sur une salle de bain personnelle. C'était plutôt pas mal comme endroit. Et tout était propre. J'aperçus une tunique posée sur la couette, et des bottes au pied du lit. L'habit était fait d'un tissu blanc et soyeux, et possédait une ceinture dorée à la taille. Le vêtement avait de nombreux plis, et je sentis quelque chose de dur en le touchant. Une petite côte de maille était camouflée dans le tissus, ainsi que deux épaulettes dorées. La tunique était magnifique. Les bottes étaient simples, marrons claires. J'entrepris de l'essayer, et même de la garder sur moi. Mieux vallait éviter de me balader avec des vêtements d'Origine, ça ne fesait pas très...Espérancien. Les épaulettes étaient faites avec plusieurs parties que l'ont pouvait bouger. Elles arrivaient jusqu'à mon coude, et pouvaient être attachées par de petites lanières de cuir à mes bras, ce que je fis. La tunique entière m'allait tout à fait. La ceinture dorée était retenue par mes hanches et la jupe n'était pas trop courte. J'enfilai également les bottes, puis la veste de magicien. L'ensemble était parfait. Je souris devant le grand miroir de la salle de bain. Si ma mère me voyait comme ça, elle se demanderait si je n'avais pas subit un petit traumatisme. Alors que je me tournais devant la glace, je remarquai deux trous verticaux dans le dos du vêtement. Ils étaient piles sur les deux omoplates, et leur fente tombait vers le bas du dos. Qu'est ce que c'était ? La forme de la tunique, simplement ? Ou..autre chose, mais quoi ? Je ne cherchai pas à comprendre pour le moment, et sortis de la chambre. En explorant un peu le bâtiment, je découvris qu'il n'était pas plein au milieu, mais troué par une grande cour. Il y avait d'ailleurs beaucoup de verdure, et des chemins pavés comme sur l'autre bloc de terre. Les quinze heures sonnèrent bien vite, tandis que j'avançais vers la salle de "cours". Il y avait là un jeune homme appuyé contre le mur, à coté de la porte. Il fixait le vide. Son expression était étrangement mélancolique. Ses cheveux étaient gris, légèrement en bataille, tombant devant ses yeux dont je ne pus voir la couleur. Il devait certainement être dans cette classe lui aussi. Je lui aurais donné environ dix-sept ans. Je me plaçai à quelques petits mètres de lui, et restai silencieuse. Un groupe de personnes finit par arriver également. Tous étaient très différents, filles et garçons. A l'autre bout du couloir, quelqu'un que je devinai être le professeur avançait d'un pas décidé vers nous. Il était plutôt grand, âgé d'environ trente ans. Ses cheveux étaient d'un blond délavé, mi-longs et paraissaient très fins. Il portait aussi des lunettes. Son visage aux traits doux me parut sage et rassurant. Il balaya le groupe de ses calmes yeux gris, et nous fit entrer. J'allais dépasser le pas de la porte lorsqu'il m'intercepta.

- Ayame Klein ?
- Euh..oui, c’est moi.
- Enchanté, je suis Mr Harusaki. Suivez-moi.

Je lui emboitai le pas et le suivit jusqu'à son bureau, sentant peser sur moi le poids d'une vingtaine de regards. Le professeur s'adressa à l'ensemble de la classe.

- Je vous présente une nouvelle élève, Ayame Klein. Elle vient d'Origine et fait ses débuts sur
Espérance. Tachez d'être agréable avec elle.

Des murmures fusèrent dans toute la salle. Je vis une table vide au fond de la salle, et allai m'y assoir en silence. Personne n'avait de stylos, de livres et de cahiers. Ils attendaient tous que le professeur dise quelque chose. Les élèves étaient tous un peu particuliers. Quelques-uns avaient les cheveux d'une couleur que je n'avais encore jamais vue auparavant, comme du rouge ou du vert. Chaque table était séparée. Le jeune homme assis devant moi se retourna. Il avait deux traits noirs sur chacune des joues, partant des extrémités du visage et plongeant vers le nez. Ses yeux étaient...jaunes, et leur pupille...verticale. Ses cheveux étaient bleus foncés, coiffés vers l’arrière. Il sourit, dévoilant des canines légèrement plus grandes que les autres dents, et me questionna.

- Salut ! Je m'appelle Aru. Tu viens vraiment d'Origine ? T'en es à ta première vie ?
- Salut...Oui, je viens d'Origine. Je ne suis pas encore morte non...
- Bah, ça devrait pas tarder...Je décxnne. J'ai jamais aimé Origine. Comment tu as pu
découvrir Espérance ? C'est censé rester secret aux Originiens.
- C'est un certain Jashin qui m'y a emmenée.
- Le vrai Jashin ?! Tu lui as parlé ? Il est comment ? Il fait peur ?
- Eh bien..
- ARU ! Retourne toi.

La voix du professeur coupa court à la discution. Ce dénommé Aru avait eu l'air étonné que je lui parle de Jashin. Il avait l'air d'être très connu, mais personne ne savait grand chose de lui apparemment. Pourquoi Jashin ferait-il peur..? C'est vrai que j'avais de drôles de sensations en sa présence, et c'était souvent de la peur. Mr Harusaki s'adressa à l'ensemble de la classe.

- Puisque nous sommes maintenant au complet, nous allons essayer de voir vos Essences.
C'est l'élément qui constitue votre nature profonde. Le mien est de type Terre par exemple.
Il est possible de posséder deux essences seulement si vous êtes un Dieu ou une Déesse.
C'est très facile de la trouver, vous devriez tous réussir normalement. Il existe la Terre, le
Feu, l'Eau, la Lumière, la Foudre, l'Air et l'Ombre. Je vais vous prêter à chacun une pierre de
magie, que vous déposerez au creux de votre main. Vous allez la fixer pendant un certain
temps, et vous concentrer dessus. La Magie devrait arriver bien vite, et produire les effets
dûs à votre élément.

L'homme posa une petite pierre multicolore sur chaque table, que les élèves saisirent au fur et à mesure. Je fis de même avec la mienne. J'étais curieuse de savoir quel type de Magie je pourrais manipuler. A ma droite, le garçon de tout à l'heure était assis, il observait la petite pierre en silence. D'ici, je pouvais voir le lilas fade qui colorait ses yeux. Je détournai mon attention de lui pour la fixer sur mon minéral coloré. Le silence se fit autour de moi comme dans toute la salle. La concentration aurait presque put être palpable. Je fis le vide dans mon esprit, et me concentra sur la pierre de magie. Cette dernière finit par réagir sous l'effet de mon énergie, et une petite sphère d'eau se forma autour d'elle. Alors je contrôlais l'eau ! Un évènement cependant imprévu vint semer le trouble dans mon esprit. La sphère se transforma en une petite tornade d'eau tenant dans le creux de ma main, créant un typhon. L'air ? Non, impossible. Je jetai de vifs coup d'oeil autour de moi, espérant que personne ne voit ce qu'il était en train de se passer sous mes yeux. L'eau finit par se dissiper, laissant une véritable tornade danser dans ma main. Cette dernière se colora lentement de noir, formant une brume ténébreuse. Et l'ombre ? Décidément, je ne comprenais pas grand chose à cette pierre multicolore. J'étais censée ne posséder qu'une Essence, et elle m'en avait fait apparaitre trois. Espérance devenait déjà invraisemblable. Toute forme de magie finit par se dissiper. D'instinct, je tournai la tête vers le garçon aux cheveux gris. Il observait ma pierre, un air d'incompréhension flottant dans ses yeux mauves. Quelqu'un avait déjà vu mon petit "spectacle". Il leva les yeux vers mon visage. Aucune expression ne marqua le sien, si ce ne fut l'habituelle mélancolie marquant ses traits fins. Je finis par poser mon regard sur le professeur, qui observait la classe d'un air satisfait.

- Bien. Je suppose que vous connaissez tous votre Essence désormais. Nous n'allons pas
descendre en salle d'entrainement pour le moment. Vous allez essayer de créer quelque
chose qui est en accord avec votre élément, sans avoir l'aide de la pierre cette fois-ci. Le
mien étant la terre, je peux faire apparaitre une roche par exemple. Pour créér quelque
chose soi même, il suffit de le visualiser dans son esprit, et de rendre cette vision concrète.
La Magie est quelque chose qui se passe dans votre pensée. Il suffit de la rendre réelle. Je
suis d'accord avec vous que ça peut paraître très flou décrit de cette façon, mais une fois
avoir essayé, ça va tout seul.

Je fermai les yeux afin de mieux "visualiser" la chose que je voulais faire apparaître. Eau, air, ou ombre ? J'étais totalement perdue. *Ils sont à moi ! Ne les touche pas...* J'ouvris brusquement les yeux. Je venais d'entendre une voix, je ne rêvais pas ! Je balayai mes alentours d'un regard affolé et noyé de questions. Qui avait parlé ? Et qu'est ce que je ne devais pas toucher ? Je repris mon souffle et réussit à me calmer, apercevant des formes de magie naissantes dans la paume de certains apprentis. Mon regard se dirigea vers le garçon aux cheveux gris. Un souffle de terreur tournoyait lentement devant ses yeux vides de sentiments. Il contrôlait l'ombre. Je crus apercevoir la fumée ténébreuse former des crânes effrayants à plusieurs reprises, aussi je fixai mon attention sur mon propre cas. L'eau était apparue en première, alors c'est ce que j'essaierai de manier. Je fermai les yeux pour la deuxième fois, et m'imaginai des gouttes de pluies s'écrasant sur le sol. Lorsque je les ouvris, je découvris de petites sphères d'eau en lévitation au dessus de ma main, qui s'écrasèrent en silence. Aru se retourna vers moi.

- Tu es de quelle Essence ?
- Euh...C'est l'eau. Et la tienne ?
- La foudre. Tu sais ce que je te disais y a quelques minutes, on parlait de Jashin.
- Oui, et tu voulais savoir si il faisait peur. Pourquoi cette question ?
- Tu sais qui il est ?
- A vrai dire, non.
- Il est apparenté à un des trois Gardiens.
- Les trois Gardiens ? Qu'est ce que c'est ?
- La Mort, Gardien de la Faille des Dieux Déchus, La Lumière, Gardien des Plaines
Lumineuses, et L'Ombre – ou le Diable si tu préfères, Gardien des Enfers, qui est en vérité le
père de Jashin.
- Jashin ? Le fils du Gardien des Enfers ? Le fils du..Diable ?!
- Ouai, voilà. Tu ne le savais pas ?
- Comment j'aurais pu le savoir ! Le fils du Diable ressemble vraiment à ça ? J'aurais jamais
cru lui parler un jour...
- En fait, non, il ne ressemble pas toujours à ça, il a juste masqué quelques parties de son
apparence pour passer un peu plus innaperçu, même si ça ne marche pas vraiment.
D'habitude il a de très grandes ailes membraneuses et des cornes. Après son visage ne
change pas beaucoup...
- ARU !! Retournez-vous une bonne fois pour toutes !

Le jeune homme aux yeux de félins s'exécuta sans broncher. Je venais d'apprendre quelque chose d'assez...spécial. Jashin était le fils du Diable. J'en serais presque tombée de ma chaise. Le Monde d'Espérance n'avait de cesse de m'étonner après chaque minute, malgré le fait que je m'attende à l'impossible. Le jeune homme que j'avais cottoyé depuis le début des vacances avait comme père le Diable. Les gens le saluaient peut être tout le temps parcequ'ils en avaient peur en fait. Aru avait l'air amusé de ma réaction face à ses paroles. Il savait qu'il s'adressait à une Originienne après tout. Mr Harusaki reprit la parole, surveillant la frimousse bleue foncée du coin de l'oeil.

- Vous savez aussi bien que moi que nous utilisons la Magie dans le but de nous défendre
lors des conflits. Ces Guerres Irréelles ne devraient pas avoir leur place sur Espérance, et
pourtant elles sont là. Savez-vous combien de victimes la Mort ramasse-t-elle par jour, sans
compter les Originiens ? Sept cents en moyenne, dont quatre cents font partie de victimes
des batailles. Le grand conseil m'a demandé de vous former pour la Guerre. Vous êtes les
futurs soldats, la génération qui devra combattre aux côtés des anciens durant la Grande
Guerre prochaine.

Un vent d’appréhension balaya les pensées fugitives. Il posa ses deux mains sur son bureau, et balaya les apprentis d'un regard convaincant, avant de continuer.

- Si je vous fait part de tout ceci, c'est parce que le prophète est parmis nous, dans cette
salle.

Des murmures s'élevèrent dans toute la pièce, et les élèves pivotèrent sur leur chaise, tentant de dénicher du regard ledit prophète. J'essayai de me faire toute petite. Pourquoi fallait-il que le professeur en fasse part à tout ce petit monde ? Je mordis ma lèvre inférieure. Avoir une importance telle que celle d'un prophète n'était pas si génial que ça peut paraître. Une chose était sûre, je ne pourrais plus jamais passer inaperçue dans les rues d'Espérance. Les rumeurs se répandent plus vite qu'on ne le croit. Un murmure à ma droite me tira de mes pensées emmêlées.

- Tu es la prophète...Ayame.

Je tournai lentement ma tête vers la voix qui venait de me parler. Le garçon aux cheveux gris avait plongé son regard d'un doux mauve dans le mien. Désespoir, tristesse, chaos, c'est ce que je lis dans ses iris à cet instant. Sa voix paraissait être celle d'une personne portant un poids énorme sur son existence, un souffle glacial, un murmure de détresse. Cette sensation d'accablement fut telle que j'en pris une expression désolée. Remarquant mon visage frappé par sa propre peine, il se força à faire un petit sourire. Il était si étrange, ses yeux étaient un véritable puits de sentiments dans lequel on aurait pu y boire sa douleur. Les quelques mots qu'il avait prononcés avaient suffit à me bouleverser. Il savait que c'était moi, la prophète. Il souffla d'autres paroles.

- Je comprends ce que tu peux ressentir. C'est un poids énorme. Le temps apaisera tes
pensées.
- Oh...Comment le sais-tu ?
- Les rumeurs vont vite sur Espérance.

La voix d'Aru retentit dans la salle, crispant mes muscles un à un.

- Qui est le prophète ?

Le silence se fit, lourd, pesant. Mr Harusaki posa son regard calme sur ma frimousse châtain claire, dirigeant l'attention de tous sur moi. Je restai silencieuse. La tension était quasi-palpable. Je fixai le professeur sans vraiment le regarder, ce dernier fit un léger sourire. Parmis les chuchotements qui retentirent, je perçus quelques "C'est la nouvelle ?", "C'est Ayame ?". Trois coups résonnèrent à la porte, détournant l'attention des apprentis vers l'entrée de la salle de classe. L'enseignant laissa échapper un "Entrez", et la porte s'ouvrit. Je ne compris pas tout de suite pourquoi les élèves se levèrent de leur chaise, posèrent leur bras droit sur leur poitrine et se courbèrent, mais j'en fis de même. Une voix très familière déclara :

- C'est bon, asseyez-vous.

Jashin se tenait debout aux côtés du professeur de Magie, auquel il chuchotait quelques mots. Tout le monde devait connaître son identité ici, et moi aussi à présent. Il observa un court instant les futurs soldats et arrêta son regard sur moi. Il me désigna la sortie d'un petit mouvement de tête. Je me levai hâtivement et pris la direction de la porte, apercevant au passage quelques regards jaloux lancés de la part des autres filles. J'inspirai avec soulagement l'air frais du couloir. Jashin sortit juste après moi.

- Je crois que ma tête n'aurait pas tenu si tu ne serais pas arrivé.
- Content de l'apprendre.
- J'ai deux mots à te dire, Jashin. Pourquoi tu n'as pas dit plus tôt que tu es...Enfin que ton..
- Que mon père est le Diable ?
- Voilà.
- Je n'ai pas jugé utile de t'en faire part. Ah, je voulais dire aussi, j'apprécierais que tu ne me
tutoie pas sur Espérance, ça fait un peu trop..Familier. Mais quand nous sommes seuls, ça
ne change rien.
- C'est toi qui a commencé à me tutoyer. Je nuis tant que ça à ta réputation ?
- Non, c'est pas ce que je veux dire. Tutoyer un Dieu, ça ne se fait pas, c'est tout.
- Ah, parce que tu es un Dieu en plus ! Tu viens de Cieux alors ?
- Bon, je ne suis pas venu ici pour te raconter mes déboires. Aller, suis moi, jeune prophète.
- Non mais j'ai d'autres questions à te poser ! Pourquoi est ce que j'ai trois Essences, alors
que les autres n'en ont qu'une ?

Il se stoppa net dans sa course. L'habituel silence pesant en profita pour reprendre sa place. Le Dieu tourna légèrement sa tête vers la droite, ne sachant que dire. Il ouvrit la bouche, comme pour commencer une explication, mais se résigna, optant pour un "Je ne sais pas". Mon visage affichait une expression contrariée, comme toujours en sa présence. J'hâtai le pas, me rapprochant un peu plus de lui. Je n'avais aucune idée de l'endroit où nous allions, mais j'avais envie de le suivre, et, je lui faisais toujours confiance. Le fait qu'il soit apparenté au Diable ne changeait pas grand chose de mon attitude envers lui, j'en savais juste un peu plus sur son identité. Il me mena jusqu'à une grande salle au plafond très haut. Il finit par se tourner vers moi, et commencer à parler.

- Tu dois savoir que tu as du retard par rapport aux autres apprentis. J'ai décidé de
t'entrainer moi même, mais je veux que tu saches que ce ne sera pas une tâche aisée. Etant
la prophète, tu dois vite apprendre à te défendre seule. Il n'y aura pas toujours quelqu'un
pour t'aider. J'ai réservé cette salle d'entrainement, personne ne viendra déranger ta
concentration. Enfin, si tu sais te concentrer et sortir toutes tes questions de ta tête.
- Mouais...Eh bien, vas-y, dis moi comment je peux me défendre avec la Magie.
- Non, on ne va pas commencer par la Magie. Les chasseurs sont malins. Ils savent que si ils
utilisent la Magie dans l'enceinte même de notre territoire, ils seront immédiatement
repérés, c'est pourquoi ils vont d'abord favoriser les méthodes au corps-à-corps pour te
capturer.
- En clair, tu veux m'apprendre à me battre, c'est ça ?
- Tout à fait. Je sais que ça prend du temps, mais il va bien falloir que tu apprennes. Les
Guerres Irréelles sont d'abord fondées sur le combat à l'épée. Cependant, l'élite des
chasseurs préfère des armes plus petites et efficaces. Des poignards ou des shurikens par
exemple.

Il sortit un petit poignard d'argent à la garde mitutieusement gravée. Il attrappa rapidement ma main droite et me fit pivoter vers la gauche, de façon à ce que je sois dos tourné à lui. Son bras droit encerclant mon torse, il plaça la lame luisante sous ma gorge. Ma respiration s'était soudainement accélérée, mais je me calmai rapidement. Si il était vraiment un ennemi, j'étais finie, là.

- Admettons que je sois un véritable chasseur, et que tu te trouves dans cette situation.
Quelle serait ta première réaction ? Epargne-moi les SOS.
- Sincèrement...Je n'en ai aucune idée.
- Tu le laisses te trancher la gorge gentiment ?
- Quand même pas ! De toute façon tu serais encore là pour m'aider...Non ?
- Ok. Et si c'était moi qui réagissait comme ça ?

Il accentua la pression de la fine lame sur ma gorge, de tel que je crus qu'il allait m'entailler légèrement. Il n'en fit rien. Je sentais sa respiration derrière mon oreille gauche. Il gardait un calme surprenant. Si ma mère me voyait dans cette situation, elle tomberait dans les pommes. Jashin savait pertinemment que je ne pouvais pas faire grand chose, et que je ne connaissais quasiment rien aux arts martiaux. Il y eut un bref silence, que je me décidai à briser.

- Je ne saurais pas quoi faire. Je pense qu'il aurait fallut que je l'intercepte plus tôt.
- Oui...Et non. Je croyais t'avoir dit que les chasseurs ne te tueront jamais, Ayame. Donc tu
peux tenter quelque chose.
- Tu viens de me dire que je me laisserais gentiment trancher la gorge !
- Et alors ? Tu te laisses facilement influencer. Tu as l'opportunité de frapper un Dieu alors
profites-en.

Sa dernière réplique me fit sourire, mais je retins le rire qui faillit m'échapper. "L'opportunité de frapper un Dieu". Ce n'était pas comme si j'allais vraiment le frapper...Le fils du Diable dut percevoir mon hésitation, car il réagit de nouveau. Il défit son emprise et me poussa brusquement. Il me tendit le poignard par le manche, et je ne pus qu'accepter. Il retira son long manteau noir qui le faisait ressembler au héros de Matrix, et adressa de nouveaux mots à mon intention.

- Qu'est ce que tu attends ? Attaque moi.
- Mais, je ne peux pas ! Enfin, je n'ose pas...Et surtout avec ce poignard !
- Tu crois peut être qu'une vulgaire lame suffit pour à me paralyser de peur ? Face à un
chasseur, tu lui demanderais si ça le dérange que tu aies une arme ?

Il n'attendit pas de réaction de ma part et décocha un coup de pied retourné dans ma direction, que je n'évitais que de justesse. Lui n'y allait pas de main morte en tout cas. Tandis qu’il m'assaillait, je ne faisais que placer un pas derrière l'autre, reculant. Il attendait vraiment que j'attaque à mon tour. Malgré la rapidité de ses coups, n'importe qui aurait pu voir qu'il se retenait énormément. Si ça aurait été le contraire, je serais probablement déjà morte et enterrée.

- Tu comptes reculer encore longtemps ? Ou tu attends d'heurter le mur de la salle ?

J'avais vu de nombreux films où des acteurs se battaient au corps à corps, il me suffisait simplement d'imiter un de leurs nombreux coups. Mais si ça partait dans le vide, ce ne serait pas non plus d'une incroyable utilité. Et, maintenant qu'il le disait, c'était vrai, le mur n'était pas très loin de moi. Pour le moment, Jashin n'avait donné que des coups de pieds. Il en enchaina un nouveau. Je me souvins que ma mère avait dansé durant quatorze ans avant de recontrer mon père. Elle m'avait appris quelques pas assez simples. J'en esquissai quelques uns en même temps de l'éviter, avançant sur son côté droit, tournant sur moi-même. Pourquoi ne pas tenter d'attaquer ? C'est ce qu'il attendait après. Après avoir pivoté sur moi même, ma jambe partit avec ma souplesse habituelle à la hauteur de son torse. Jashin le vit venir, aussi s'était-il accroupi. Il me lança un balayage que je ne vis pas venir, et je tombais pour la première fois sur le sol matelassé de la salle d'entrainement. Ca ne serait surement pas la seule fois. Je le vis sourire du coin de l'oeil. Il s'accroupit à côté de moi.

- L'attaque est la meilleure des défenses. Tu dois apprendre à placer des coups en anticipant
mes propres mouvements. Aller, debout. Fais moi le même coup que tu viens de lancer.

Je m'exécutai en silence, attendant à chaque fois ses prochaines paroles. Je lançai un coup de pied pour la deuxième fois. Il l'intercepta à nouveau, atrappant cette fois-ci mon mollet en vol.

- Tu ne frappes pas assez fort ! Fais comme si tu étais face à un vrai ennemi bon sang ! C'est
la dernière fois que je te le répète. Ton coup ne doit pas s'arrêter une fois avoir heurté ton
adversaire, il doit le traverser, compris ?

Je me contentai de faire un petit mouvement de tête en signe d'affirmation. Il m'incita à recommencer, ce que je fis, avec nettement plus de force cette fois-ci. Le fils du troisième Gardien dut le sentir, puisqu'il afficha un air satisfait. Mais la force n'était pas un de mes points forts. Je préférais la souplesse , la rapidité et la précision. Il me décocha à son tour un coup, que j'esquivai en m'abaissant, tentant à mon tour un balayage. Il fit un bond en l'air, et, légèrement projeté vers l'arrière, il fit un rapide salto arrière. Trop occupée à le regarder faire ses acrobaties, je ne vis pas le coup qui m’atterrit en plein dans la mâchoire, m'obligeant à reculer sous l'effet du choc. Tout de suite, je portai ma main sous mon menton, tentant d'atténuer la douleur vive. Il atterrit silencieusement à une distance respectable de moi, se raclant la gorge.

- Ca fait mal ?
- Un peu, oui !
- Il faut que tu saches que tes adversaires ne se retiendront pas. Et puis, le fait que tu
reçoives des coups t'endurcira, alors je n'ai pas besoin de me retenir.
- Si tu veux que je finisse en charpie, dis le moi de suite hein !
- Tu sais, si j'étais un chasseur, j'aurais tant enchainé les coups que tu ne pourrais même
plus te relever. Alors arrête un peu de te plaindre.
- Tu es vraiment un prof sévère...
- C'est comme ça que j'ai appris à combattre, alors fais-en autant.

Je continuai ainsi jusqu'à dix-huit heures du soir, enchaînant coup sur coup. Je ne m'étonnai même plus d'en recevoir, mais je ne réussis à en placer aucun. Jashin m'apprit que c'était son père lui-même qui l'avait entrainé, avec plus de difficultés encore. Il me répétait sans cesse de ne pas quitter des yeux ses bras et ses jambes, et d'essayer de percevoir les coups qu'il allait me porter, et de les parer si possible. Mais, c'est en forgeant qu'on devient forgeron, et je savais qu'il me faudrait de très nombreuses heures de travail afin d'avoir une pratique exemplaire du combat. Une fois que j'aurais une meilleure habilité aux arts martiaux, Jashin passera directement au maniement de l'épée. Cette vie me plaisait déjà. Néanmoins, je savais que quand je serais de nouveau en présence des autres apprentis, mon malaise s'accentuerait. Ils savaient maintenant que c'était moi, la prophète. Ils allaient surement me poser un tas de questions...La voix du Dieu me tira de ma rêverie.

- Ayame ! Tu m'écoutes ?
- Ah ! Euh..Oui oui.
- Je n'en suis pas vraiment sûr. L'entrainement est fini pour aujourd'hui. Allonge toi.

Je fis ce qu'il me dit, et m'étendit sur le matelas de la grande salle. Il s'agenouilla à côté de moi, et passa lentement sa main au-dessus de mon corps. Une lumière apaisante recouvrit sa paume, détendant chaque parcelle de mon être. Les quelques bleus qui pigmentaient mes bras disparurent sous mes yeux. C'était un pouvoir de guérison ! Jashin finit par retirer sa main, et se leva. Je me remis debout à mon tour, ayant quasiment retrouvé toutes mes forces. Il s'adressa de nouveau à moi.

- Voilà. Ce n'est pas le genre de pouvoir que je manie à merveille, mais c'est mieux que rien.
- Je trouve ça super !
- Content de l'apprendre. On se voit ici demain matin, à neuf heures. Bonne nuit Ayame.

Son corps disparut de ma vision avant que j'eus le temps de lui répondre, dissipant ce même brouillard ténébreux. Un après-midi venait déjà de s'écouler, et j'avais découvert beaucoup plus de choses que prévu. J'ouvris la porte de mon dortoir avec lassitude, et me laissai tomber sur le lit moelleux. Je me remémorai en silence les paroles de Jashin. Sa voix avait été plus confiante que d'habitude, et son attitude m'avait parut ouverte. Il avait cependant gardé son habituel côté malicieux. Il avait parlé de ses "déboires" lorsque j'avais déduit son appartenance à la Divinité. Etait-ce un poids d'être un Dieu ? Et si Jashin en souffrait, en réalité ? Peut être passait-il beaucoup de temps avec moi dans le but d'oublier ses charges sur Cieux. A quoi ressemblaient les Enfers ? Inconsciemment, mes pensées se dirigeaient sans cesse vers Jashin. Un long soupir m'échappa. Je détestais Origine. Ses leçons me manquaient déjà. Je ne voulais pas aller manger dans le grand réfectoire, et voir tous les visages inconnus des apprentis. Il y avait peut être Aru et le garçon aux cheveux gris, mais je savais que tous les regards pèseraient sur moi, aussi lourd que l'est le ciel gris d'un jour d'Automne sur Origine. Pour le moment, Jashin était la seule chose qui me poussait à sourire ici. Le reste, tout le reste m'aurait presque rendue triste. Je savais que j'étais la prophète, mais qu'étais-je censée accomplir ? Allais-je devoir livrer bataille ? Y aurait-il des...morts ? Par ma faute ? Tant de questions. J'entrepris de tout demander au fils du Diable le lendemain matin. A contrecoeur, je me levai et me dirigeai vers le réfectoire. Je ne connaissais pas le chemin qui y menait, aussi je me guidai grâce au petit plan fournit par le directeur. Je finis par arriver dans une grande salle plus longue que large, où de nombreux apprentis avaient déjà pris place devant des couverts d'argent. Personne ne tourna la tête vers moi, ce qui me rassura légèrement. J'aperçus le dénommé Aru assis au fond du réfectoire, occupé à bavarder avec quelques autres élèves. Sans réfléchir, je plaçai un pas devant l'autre et m'avançai vers lui. Il était quasiment le seul à qui j'avais parlé depuis mon arrivée à l'académie des magiciens, et il n'avait pas l'air désagréable. A en juger par ses rires nerveux, il devait raconter des idioties avec ses amis. Aru tourna la tête vers moi lorsqu'il entendit le bruit de mes pas, et fit un grand sourire, dévoilant ses canines d'une blancheur étonnante.

- Salut Aru. Je peux m'assoir avec vous ?
- Re Aya. Bien sûr !

Je pris place sur un grand banc de bois ciré à côté de lui. Il commençait déjà à utiliser ce petit préfixe qui me vallait un surnom, "Aya". Une désagréable impression d'être observée me prit dès que j'eus posé mes yeux sur un magnifique couteau d'argent. Je levai lentement le regard vers la personne qui était assise en face de moi, et découvris deux torches incandescentes me fixer avec obstination. Un garçon aux cheveux couleur épi de blé posait sur moi son regard brûlant. Ses iris étaient semblables à des flammes dansant éternellement dans leur petite prison. Il n'était pas très vilain de physique, au contraire...En revanche, son expression courroucée ne donnait pas très envie de lui parler. Il tapota nerveusement la table drapée de blanc avec sa main droite, reportant son attention fâcheuse sur Aru qui faisait de grands signes de la main en direction de l'entrée. Le blond prit brusquement la parole.

- Aya ? Ayame ? Ca veut dire quoi, ça ? C'est cette petite chose, la prophète ?

J'affichai automatiquement une expression outrée, posant mon regard sur lui. "Cette petite chose" ?! Non mais pour qui il se prenait celui-là ? Le jeune homme aux yeux jaunes reprit un air sérieux, et lui répondit, contrarié.

- Qu'elle soit "une petite chose" ou pas, qu'est ce que ça change ? Je te permets pas de parler
d'elle comme ça.
- Ah, tu la défends en plus ! C'est à cause de tous ces complots que des guerres éclatent.
- C'est pas sa faute si elle est née en tant que porteuse de la Lumière ! Comment tu peux
juger les gens comme ça ?
- Tss..!

Il détourna le regard, et conserva son expression offusquée. Le brasier qui consumait ses iris s'était accentué. Aru me regarda et fit un petit sourire, comme pour essayer de me réconforter un peu, et je le lui rendis. Tout le monde était au courant que Ayame était le nom de la prophète, et aussi le mien...Décidément, ça commençait bien. Tournant la tête vers la droite, j'aperçus une tête familière. Le garçon au cheveux gris regardait droit devant lui, fixant le vide de son regard mélancolique. Il était assis seul, et ne semblait désirer aucune compagnie. Je poussai un soupir. Mes yeux allèrent de nouveau vers le garçon blond, qui avait continué à me détailler pendant ce court laps de temps. Il détourna rapidement le regard, faisant mine de rien. Mes sourcils se froncèrent sans vraiment que j'en prenne conscience. Il m'agaçait déjà. Les apprentis tournèrent tous la tête vers le même endroit, c'est à dire le vieux directeur de l'académie, qui leva les couverts d'un petit signe de la main. Les mets étaient nombreux et tous différents, l'odeur et leur couleur donnait envie de tous les goûter. Je servis quelques plats dans mon assiette. La délicieuse nourriture n'était qu'à quelques millimètres de ma bouche quand j'eus l'impression qu'on me plantait un couteau dans la tête. Ma main lâcha brusquement la fourchette métallisée qui s'écrasa sur le sol avec un bruit cristallin. Mes alentours stopèrent leur mouvement pour poser leurs regards sur moi. Je tenais ma tête de ma main gauche et serrais les dents sous l'effet de la douleur. *Elle est empoisonnée...Les chasseurs sont partout, tu es trop inconsciente...* La voix d'il y a quelques heures était revenue. La nourriture ? Empoisonnée par les chasseurs ? Le regard interrogé d'Aru me fit prendre la parole.

- C'est empoisonné ! Les chasseurs l'ont empoisonnée..!

J'avais dit ça sans vraiment réaliser que ce n'était qu'une voix venant d'ailleurs qui m'en avait fait part. Si c'était faux, j'allais réellement passer pour une folle aux yeux des élèves assis près de moi.

- Comment ? C'est impossible ! Qu'est ce que tu racontes ?
- Ca y est, elle commence à délirer...

Je jetai un regard noir sur le garçon blond qui avait prononcé les dernières paroles. Il le soutint cependant, une pointe de défit au fond de ses iris orangés. Je ne pouvais pas être sûr de ce qu'avait dit cette étrange voix, mais tout me poussait à l'écouter. Le directeur m'observait du coin de l'oeil, malgré le fait qu'il était à l'autre bout de la salle. Comment pouvais-je m'assurer d'une quelconque présence de substance indésirable là-dedans ? Une main se posa sur mon épaule, et une voix douce me souffla un "Laisse-moi faire". Ma tête pivota vers la personne en question, et mes pupilles furent confrontées à deux perles mauves noyées dans leur désolation. Le garçon aux cheveux gris plaça sa main au dessus de l'assiette, et se concentra un cours instant. Une fine brume violacée se mit à flotter entre sa main et le plat. Il murmura une explication.

- C'est du Marra Flou. Il n'est détectable qu'en usant d'une magie particulière à proximité.
C'est un poison de type ombre qui a la particularité d'être attiré par des particules
spirituelles en mouvement. Si tu aurais ingéré ceci, ses molécules se seraient multipliés dans
tous tes canaux d'énergie, et tu n'aurais pas pu pratiquer de Magie durant un certain temps.
Il n'a cependant aucun effet négatif sur ton organisme, ça ne t'aurait pas été fatal. Mais,
mieux vaut éviter d'y goûter.

Aru observait la substance terne avec de son regard de félin. Il avait l'air plutôt impressionné. Le blond, en revanche, avait détourné le regard. Le garçon aux cheveux gris fit disparaître par je ne sais quel autre moyen le poison et retourna à sa place sans en dire plus. Les chasseurs savaient déjà que j'étais ici...Ils pouvaient même être à l'académie en ce moment même. Le calme revenu, je pus enfin commencer à manger. Je ne m'aperçus que le plafond était fait de vitres transparentes que lorsqu'une lueur pourpre envahit la salle entière. Quelques apprentis magiciens levèrent la tête vers les cieux, moi compris. Les nuages étaient d'un noir profond, ils dominaient la voûte céleste qui elle était d'un rouge vif. Quelques grondements se firent entendre, suivis d'une forte pluie. Mais l'eau n'était pas transparente, elle était...Couleur de sang. Face à mon expression horrifiée, Aru se mit à me parler.

- La Nuit appartient au troisième Gardien. Mais il laisse son fils la gérer. En clair, c'est le
seigneur Jashin qui fait parfois pleuvoir du sang...J'avoue que ce n'est pas très rassurant. En
fait, ça le fait surtout passer pour un psychopathe, c'est aussi pour ça que la plupart des
Espéranciens en ont peur.
- Du sang ? D'où vient-il ?
- C'est le sang des Espéranciens qui furent tués au cours de batailles. On dit que le seigneur
Jashin se nourrit de leur profond désespoir. Mais ce ne se sont que des rumeurs, hein...
- C'est terrible...

La voix de l'apprenti aux yeux de braises vient s'immiscer dans la discution. Il parlait moins fort qu'avant.

- Le seigneur Jashin est un monstre ! Il consume les Âmes dépravées qui osent errer sur les
Enfers. Mais il a prit une part du caractère de son père, et nous ne pouvons lui en vouloir. Il
est au courant de ce que de nombreuses personnes pensent de ses actes malfamés, et La
Lumière seule sait si il m'entend parler à cet instant. Le fils du Diable sait faire trembler les
Âmes...
- On voit que son influence agit assez bien sur Okoru en tout cas ! Au moins ça lui rajoute
une victime...

Aru laissa échapper un éclat de rire moqueur. Okoru ? C'était certainement le garçon blond qui portait ce nom. Il lui lança un regard noir. La fin du dîner se déroula de façon plutôt "normale", si jamais ce mot avait sa place sur Espérance. Je dois avouer que j'en doutais fort. Je regagnai mon dortoir en silence. Je ne parvins pas à m'endormir tout de suite. En l'espace d'une semaine, je m'étais retrouvée sur un autre Monde nommé Espérance en compagnie du fils du Diable, Jashin. J'étais une prophète, faisant partie de ceux qui venaient au monde une fois tous les mille ans. Mon but était de sauver Espérance en mettant fin à une Grande Guerre, où tout le monde pratiquait la Magie. On tenterait peut être de me porter atteinte à chaque coin de rue, et je ne connaissais rien de tout ça. Ma petite vie paisible avait pris un cours incensé. Mes yeux verts clairs se posèrent sur l'étrange tranquilité de la Lune, rouge, baignant dans son lit de noirceur que rien ne paraissait troubler. Je ne parvenais pas à trouver ma place. *Je suis là, petite prophète.* La voix avait brisé mes pensées silencieuses. Je n'avais aucune idée de l'endroit d'où venaient ces paroles d'allure sage, mais je commençais à les apprécier. Un fin sourire fendit mon visage. Le lendemain me réserverait sans doute des surprises, mieux vallait me reposer.
Les rêves avaient troublé mon profond sommeil. Mes yeux de nature claire s'ouvrirent brusquement, puis revinrent à l'accalmie. La chambre était entièrement noire, et aucun bruit ne venait troubler son sombre silence. Je dirigeai parresseusement mon bras vers la petite table de chevet, et saisis mon portable après quelques tentatives désespérées. Il affichait cinq heures vingt-cinq. Seulement ? Un long soupir m'échappa. A en juger par la forte activité de mes "neurones", je n'arriverais plus à m'endormir. J'enfilai rapidement la tunique de soie blanche et me dirigeai vers la porte de la pièce. Je l'ouvris lentement, tentant de faire le moins de bruit possible. J'atteignis la grande cour remplie de verdure à pas feutrés. Le seul bruit présent était celui de l'onde cristalline persévérant dans sa course éternelle. Les nombreuses grappes de fleurs blanches pendant aux arbres avaient gardé leur luminosité. Elles luisaient par endroits, comme pour imiter les constellations, attirant de nombreux essaims de petits insectes volants. Une lueur attira cependant mon attention, se distinguant des autres. Elle était à quelques nombreux mètres de moi, et n'était pas immobile. Il y avait là une femme, debout au milieu de l'herbe touchée par la rosée. La personne était grande et fine, son corps entier diffusait une lumière douce. Sa tête était ornée de longs et magnifiques cheveux blonds lui tombant jusqu'au bas du dos, retenus en arrière par un diadème de perles. Elle était vêtue d'une robe blanche et légère, à laquelle s'accompagnaient de nombreux voiles transparents. Elle était éblouissante. M'approchant de quelques pas, je m'aperçus qu'elle tenait un violon de verre dans ses mains délicates. L'archer paraissait avoir été jeté au sol. Il était cassé en deux. La femme l'observait de ses yeux d'un bleu limpide. Une présence sur ma droite détourna mon attention d'elle. L'instant d'après, il ne restait plus aucune trace de cette apparition. Le mystérieux garçon aux cheveux gris me détaillait d'un air perplexe. Il m'adressa la parole, gardant son habituelle voix douce.

- Hana, la Déesse de la Beauté. Elle a brisé son archet en hommage à la défunte Déesse du
Désespoir, qui fut son amie durant de nombreux millénaires. Les Dieux qui s'ennuient
descendent souvent sur le sol
d'Espérance. Nombreux sont ceux qui croisent leur route...
- Oh, je vois...Elle mérite son titre. Et...Je ne sais toujours pas quel est ton nom.
- Fukahi. Tu es déjà debout ? Je crois savoir que tu rattrapes ton retard en combat.
- J'avais du mal à me rendormir...Mais, je pourrais te poser la même question. J'ai commencé
l'entrainement hier.
- Eh bien...Moi aussi.

Il posa son regard couleur de lilas sur la tunique que je portais. Il regarda un instant les épaulettes, sur lesquelles étaient gravées de minuscules écritures incompréhensibles. Il m'interrogea.

- Tu portes une tunique de Déesse ?
- Elle appartenait à la soeur de Jashin...C'est lui qui me l'a prêtée.
- Ah...Cette jeune Déesse...Elle a mal finit.
- Elle est..morte ?
- La Lumière l'a envoyée dans la faille des Dieux Déchus. Elle a péché pour le bien de son
frère. En vallait-il vraiment la peine ?
- Je comprends la moitié de ce qu'on me raconte ici...J'ai tant de questions sans réponses !
- Pose-les moi, je saurais peut être y répondre.

Il plongea ses yeux tristes dans les miens, et un sourire étira son fin visage. Il m'invita à m'assoir dans l'herbe à côté de lui, comme si il savait d'avance qu'il possédait des réponses à certaines de mes questions.

- Je voudrais savoir, que dois-je accomplir en tant que prophète ?
- Je n'ai moi-même qu'une idée floue de ton vrai but. D'après les anciens écrits, c'est à dire
les traces laissées par les anciens prophètes, ils sont ceux qui ont mis un terme aux Grandes
Guerres. Je ne sais cependant par quel moyen. Depuis toujours, il y a deux grands Royaumes
sur Espérance, celui sur lequel tu as déjà posé les pieds, et sur lequel nous sommes en ce
moment, Onirica Paranda. Le deuxième est Lahuca. Généralement, les Parandiens habitent
sur ces grandes cités célestes que tu as pu remarquer. Les Lahucaïens siègent sur les
"bas-plateaux", c'est à dire la terre ferme. Si ils ont une principale différence, c'est que leur
idéologie est différente. Tu dois peut être savoir que les complots et conflits font partie de
la "pensée originelle". Un Monde ne pourrait jamais perdurer dans le bonheur, et c'est
pourquoi les troubles sont là. Tu sais que si les guerres n'existeraient pas, il n'y aurait que
deux Gardiens, La Lumière et La Mort, et c'est impossible. Ton but en tant que prophète est
de tenter d'arrêter cette guerre principale. Je sais que ça paraît vraiment difficile...
- Je vois...C'est pour ça que certain m'appellent la "porteuse de Lumière" ?
- Oui, car tu es pour eux comme l'espoir d'une renaissance.
- C'est assez...spécial. J'ai du mal à croire que je pourrais parvenir à transformer un Monde
entier. J'ai surtout peur d'une chose en fait.
- Laquelle ?
- J'ai peur de voir mourir des personnes chères à mon coeur...Pendant ces "Guerres
Irréelles"...
- C'est une réaction normale tu sais...

Il se mordit la lèvre. Pour la première fois depuis que je l'avais vu, il avait l'air énormément tourmenté. Un ouragan de sentiments différents envahit son regard qui, jusqu'à présent, était resté paisible. Ses mains se crispèrent sur ses jambes habillées de noir. Ma première réaction fut de le questionner sur son état. Il ne me répondit pas, préférant se relever. Ses pas plus rapides que d'habitude le menèrent jusqu'à la grande porte de l'académie. Je fis une moue dubitative. J'avais dit quelque chose de mal ? Ou était-ce simplement son caractère ? Il était également possible qu'il aie perdu quelqu'un de cher. J'avais néanmoins obtenu quelques réponses, et ça me convenait pour l'instant. Il me suffisait de mettre une fin définitive à ces Grandes Guerres ancestrales. C'était effectivement une lourde charge qui m'avait été assignée. J'étais en droit de reculer, mais l'espoir de trop de personnes était placé sur moi pour oser les décevoir. Je me mis en tête de ne jamais abandonner, quoi qu'il puisse arriver.
J'étais déjà dans l'immense salle d'entrainement lorsque les neuf heures sonnèrent. Une dizaine de minutes s'écoulèrent lentement sans que je voie Jashin arriver. Je commençai à me faire impatiente lorsque la grande porte fut enfin poussée. Le fils du Diable m'adressa un petit signe de la tête en guise de bonjour, portant sur lui son habituel manteau noir. Je ne le perçus pas dans l'immédiat, mais son souffle était plus lent que d'habitude. Était-il fatigué ? Il me dit enfin quelques mots.

- Tu souhaites t'entrainer tout de suite ou tu as quelques questions à me poser ?
- Euh...C'était vraiment toi, le sang, hier soir ? Parce que c'était particulièrement...macabre.
- Oui, c'était moi. C'est le genre de choses qui te fait peur ?
- Un peu, oui ! Tu vois, sur Origine, la nuit ressemble un peu plus à un tapis noir parsemé d'étoiles. Enfin, c'est déjà plus rassurant.
- C'est tout ?

Il leva les yeux au ciel et jeta son manteau sur le sol. Je retins une exclamation. Ses bras étaient entièrement recouverts de bandages, eux-mêmes colorés de nuances rappelant celles du sang. Comment s'était-il fait ça ? La peur me prit au ventre. Si Jashin, qui était un Dieu, avait subit un traitement comme celui-là, qu'allais-je devenir ? Il perçut mon anxiété et détourna le regard. J'espérais intérieurement m'être trompée sur l'origine de ses bandages imbibés de sang, mais je n'avais aucune autre idée en tête. Le Dieu dit des paroles d'une voix vexée.

- Tu vas continuer à m'observer longtemps ?
- Non non...Vous vous êtes blessé ?
- Je ne suis pas idiot à ce point, non. J'ai juste participé à quelques duels disons...enragés.
- Des duels ? De vrais combats ? Je n'étais même pas au courant ! Ca se déroule où
généralement ?
- Ayame ! Tu réalises que ce sont des combats entre Dieux ? Espérance serait réduit à l'état
de poussière si j'aurais combattu sur ses terres.
- A ce point-là...Mais, ce sont quels genres de duels ? Je veux dire, de quelle façon est ce que
vous vous battez ?
- Nous usons simplement de notre type de Magie, le Feu et l'Ombre pour moi. Et puis de
toute façon tu n'as rien d'autre à savoir là-dessus. Les actes de Cieux ne te concernent pas.

Je décidai de ne pas en demander plus, Jashin avait l'air déjà assez contrarié comme ça. Parler de ses propres blessures parraissait le rendre mécontent. Un petit sourire apparut à l'extrémité de mes lèvres. Après tout, le fils du Diable n'était pas quelqu'un de si invincible que ça. Le fait que ce soit un autre Dieu qui lui avait infligé ces séquelles m'avait légèrement apaisé. Les combats divins devaient être des choses absolument titanesques. Jashin en avait d'ailleurs gardé des marques, et il avait l'air d'avoir consumé une grande part de son énergie. Je fis un grand vide dans mes pensées, et débuta un nouvel entrainement. Je me fatiguai ainsi jusqu'à midi pile, heure à laquelle Jashin m'accorda une pause. J'étais parvenu à esquiver nettement plus de coups aujourd'hui. Je me mis en route vers le réfectoire, espérant y retrouver Aru ou Fukahi. Je finis par atteindre la porte grande ouverte de la salle à manger. La frimousse bleue foncée était placée au même endroit qu'hier, mais je ne vis pas l'ombre du garçon aux cheveux gris, ce qui me déçut. Je rejoignis Aru, qui était en compagnie d'Okoru. Ce dernier afficha une expression méprisante en me voyant arriver. Je saluai le garçon aux yeux jaunes, et décidai de ne pas lui prêter attention une seconde de plus, malgré l'indésirable sensation de sentir son regard de braise posé sur moi. La voix habituellement enjouée d'Aru me rassura.

- Tiens, Aya ! Tu tombes bien. Je sors dans Kaïa avec Okoru jusqu'à quinze heures. Tu
pourrais venir, non ? Ca te permettrait d'en découvrir un peu plus..
- Avec plaisir !

Okoru porta sa main gauche à son front, faisant mine de porter son attention vers sa droite. Ca avait l'air de lui déplaire plus qu'autre chose, mais tant qu'à faire...Je n'étais pas sortie une seule fois de l'académie depuis que j'y avais mis les pieds. "Kaïa" devait probablement être le nom de la cité située sur le bloc en dessous. Mais alors...J'allais devoir descendre puis remonter l'interminable escalier ? A moins que l'un des deux garçons sache utiliser le téléport. Je priai silencieusement pour que ce ne soit pas le blond désagréable. Si jamais il ne voulait pas me téléporter, ça serait juste horrible. Le directeur de l'académie refit le même mouvement qu'hier soir, et tous les apprentis commencèrent leur repas. Je me dépéchai de finir le mien afin d'avoir plus de temps libre. Aru m'indiqua que nous nous rejoindrons devant l'académie, au parc des fontaines. Je sortis bien vite, ne découvrant qu'Okoru, seul au milieu du grand parc pavé. Il ne me prêta pas spécialement attention, ce qui me détendit. Être seule avec lui me parut déjà insupportable. Aru ne mit que quelques minutes de plus à nous rejoindre, affichant un grand sourire.

- Bon, allez, Okoru, téléporte nous.

D'une certaine façon, c'était prévisible. Aru était, comme moi, débutant en Magie. A quelle classe Okoru pouvait-il appartenir ? Son niveau en maîtrise magique était nettement supérieur au mien, c'était certain. Il posa sa main sur mon épaule à contrecoeur, et, l'instant d'après, je me retrouvai dans les ruelles recouvertes de dalles à leurs côtés. Le jeune homme aux yeux jaunes nous entraina dans différentes allées, saluant quelques personnes à son passage. Il désignait parfois ce qui me parurent être des boutiques, m'offrant certaines explications, parmis lesquelles je compris que c'était les endroits les plus fréquentés de Kaïa. Il me montra également la grande armurerie, admirant au passage de splendides armes exposées en vitrine. Il me fit signe d'entrer à l'intérieur, suivit d'Okoru. Les murs étaient tapissés de lames argentées de toutes sortes. Les deux jeunes hommes saluèrent discrètement le vendeur, un homme costaud et barbu. Aru s'arrêta devant un épais grimoire rempli d’écriture et de croquis, et s'adressa à moi.

- J'ai jamais su pourquoi les Dieux avaient des armes, si ce n'est pour combattre entre eux. A croire que tout les pousse à enfreindre la grande parole.
- La grande parole ? Qu'est ce que c'est ?
- Il est strictement interdit aux membres du Panthéon d'intervenir dans des conflits d'origine humaine. Si jamais ils enfreignent ces dires, une place leur est admise sur Faux Néant. Cette "loi" a été créée afin de restreindre le pouvoir divin. Si chaque Dieu faisait ce qu'il voudrait sur Espérance...On n'en finirait plus.
- Ah, je comprends. Est-ce que tu as une arme ?
- Non…Justement, je vais en profiter pour les voir, et en prendre une, qu’est ce que tu en penses Okoru ?

Le garçon aux cheveux blonds haussa les épaules d’un air indifférent, détaillant de magnifiques épées accrochées au mur. Aru alla questionner le gardien de l’armurerie sur une arme qui lui serait bien appropriée, me laissant seule face à l’épais écrit. En analysant un peu plus les écritures, je parvins à comprendre quelques mots qui se rapprochaient de ma langue. Ma langue ? Non, c’était impossible, tout Espérance ne pouvait parler couramment l’Anglais. Avait-on une langue universelle sur ce Monde ? Je l’avais peut être apprise automatiquement en mettant les pieds ici. C’était assez spécial, j’avais l’impression de connaître l’étrange écriture figée sous mes yeux depuis toujours. Je tournai lentement les pages, avant d’apercevoir un grand titre, « Les Armes Divines », et un sous-titre, « D’après les connaissances ». De petits croquis étaient réalisés sur la partie gauche des pages jaunies par le temps, et des explications siégeaient sur la droite. Je passai rapidement en revue tous les schémas, cherchant du regard le mot « Jashin ». Après avoir tourné plusieurs fois les pages, je me résignai. L’écrit était certainement trop vieux pour contenir la nouvelle génération divine. La voix d’Aru me tira de mes pensées.

- Aya ! Qu’est ce que tu en penses ? Ils sont pas mals, non ?
Revenir en haut Aller en bas
Le Jokker

Le Jokker

Réglisse qui glisse


- MESSAGES : 365
- DATE D'INSCRIPTION : 16/01/2011
- AGE : 28
- LOCALISATION : Zbeum :3 Bobo la tête >0<
- HUMEUR : M. ? Save me.

Papiers
- TEAM: Nounours :3
- PROFS, ELEVES: Pleins de p'tits n'élèves
- RELATIONS:
• A Deux Pas de l'Enfer • Vide
MessageSujet: Re: • A Deux Pas de l'Enfer •   • A Deux Pas de l'Enfer • EmptyMer 16 Fév - 1:35

[SUITE]


Le garçon tenait dans ses mains deux dagues de taille plutôt moyenne. Leur lame était faite d’argent, et la garde était noire, incrustée de petites pierres bleues foncées. Les armes étaient légèrement recourbées vers l’arrière, et le métal ne paraissait avoir aucun défaut. Aru avait l’air quelque peu hésitant. *Je vais t’offrir une excellente analyse, ma petite prophète…* La voix avait de nouveau parlé dans mon esprit. Je m’approchai des deux armes, et des paroles que je ne voulais pas spécialement prononcer sortirent de ma bouche sans vraiment que je sache comment. Ma main saisit une des dagues.

- La lame est faite en Sparta, c’est un métal particulièrement lourd qui requiert une bonne maîtrise du maniement des armes. Il est officiellement utilisé pour les Guerres Irréelles, car cette matière conduit l’énergie tout en la poussant dans ses limites, c'est-à-dire que la puissance de frappe est décuplée ; c’est un matériel offensif. La garde est faite de Denma, qui en revanche est de type défensif. Les petites pierres de couleur bleue réagissent à l’approche d’une Magie classée malsaine pour le porteur de ces armes, c'est-à-dire qu’ils vont créer un champ de force provisoire autour des bras seulement. Aru, je ne pense pas que tu devrais prendre celles-là pour le moment. Il serait préférable de te contenter de dagues basées sur l’entrainement. Je pense que ta maîtrise n’est pas encore assez développée pour contrôler à merveille le Sparta. Ce n’est que mon opinion personnelle…

Aru me fixa longuement de ses yeux de félins, hébété. Je ne savais pas moi non plus d’où me venait cette connaissance soudaine, mais ce n’était pas si mal que ça. Je remarquai du coin de l’œil qu’Okoru m’observait d’un air incrédule, les sourcils en suspens. Le vieil armurier me sourit en hochant la tête en signe d’affirmation. Il proposa de nombreuses autres dagues à Aru qui finit par se décider.

- Tu ne prends rien Aya ?
- Oh, euh…Mais je n’ai pas de votre argent bizarre…Je viens d’Origine, tu sais.
- Oh, vous êtes Ayame ? La jeune prophète dont tout le monde parle ? Si c’est le cas, le Seigneur Jashin m’a laissé assez de trésorerie en votre nom pour que je vive aisément ma vie. Vous pouvez vous choisir une arme je suppose…
- Oui, c’est bien moi…Merci à vous !

Jashin pensait vraiment à tout…Moi qui était du genre à tout oublier. Il fallait que je le remercie d’avoir fait ça, au moins cet après-midi. L’armurier me questionna sur le type d’arme que j’appréciais. Je ne pus lui répondre de face claire, puisque je n’avais jamais tenu une vraie épée, ou quelque chose d’approximatif. Je me décidai finalement à prendre une petite épée d’argent, simple et légère. La garde protégeait entièrement la main, comme les anciennes épées d’apparat, et était faite d’un métal qui semblait assez solide. Je finis par sortir, suivant Aru et Okoru. Le ciel s'était fait grisonnant, il semblait peser tout entier sur Espérance, manquant de s'effronder à chaque minute qui s'écoulait lentement. Le garçon aux cheveux bleus foncés nous mena jusqu'à un endroit que je ne connaissais. Un immense édifice était dressé vers le ciel. Il était fait entièrement de marbre blanc, soutenu en hauteur par de largs colonnes blanches. Un grand escalier lisse y menait. Aru me fit savoir qu'il s'agissait là de la Bibliothèque où étaient stockées toutes les oeuvres d'Espérance. Il m'inscita à y entrer, ce que je fis. A chaque pas que je faisais, je sentais que le regard d'Okoru était constamment posé sur moi. Cette impression me rendait mal à l'aise, et ce n'était pas le genre de personne à qui je ferais facilement confiance. Aru me proposa d'emprunter la copie du témoignage du précédent prophète. J'acceptai volontiers, curieuse de savoir la façon avec laquelle l'autre élu avait agi. La bâtisse était composée de trois étages, dans lesquels étaient placés de grandes étagères de bois qui atteignaient facilement le plafond. Elles étaient remplies de différents écrits, tous rangés à une place spécifique. Et surtout, le silence dominait, perpétuel. Aru finit par sortir, dévalant les grands escaliers, tentant de perdre le moins de temps possible. Je les descendis tranquillement, Okoru allant à ma vitesse. Il n'y avait personne dans la rue frontale à la Bibliothèque. Je fronçai les sourcils dans l'incompréhension. Une simple coïncidence ? Il y avait pourtant eu beaucoup de monde quand nous étions entrés. Une silhouette se découpa finalment au fond d'une ruelle voisine. L'ombre se tint droite, debout sur ses deux jambes. Il paraissait avoir un long manteau faisant office de cape, venant trainer jusque sur le sol pavé. Je ne parvins pas à distinguer son visage, mais l'éclat d'une lame de petite taille qu'il tenait dans sa main gauche me fit cligner des yeux. Une large capuche recouvrait son visage. Aru se dirigeait pile dans cette ruelle, regardant vers la droite d'un air insouciant. L'inconnu fit rapidement tourner le poignard au bout d'une longue et fine chaine, émettant un cliquetis singulier. Le jeune homme aux yeux jaunes tourna la tête en face de lui. La silhouette avait déjà disparu. Okoru accéléra le pas, rattrapant Aru. Ils commencèrent une discussion dont je n'entendis pas le sujet de la distance à laquelle je me trouvai d'eux. En l'espace d'une seconde à peine, je m'étais retrouvée plaquée derrière une des épaisses colonnes blanches, une main gantée sur le bas du visage. Mes yeux affolés détaillèrent rapidement la scène. Il y avait une personne assez grande debout devant moi. Je ne vis pas de suite son visage tourné vers la droite, et recouvert d'une large capuche...bleue marine. Il portait un manteau très long, trainant jusque sur le sol. Elle n'était attachée que par de grandes lanières de cuir colorées de bleu ciel du torse à sa taille. Une chaine entourait son bras gauche, au bout de laquelle la lame était fixée. Elle trainait elle aussi au sol. Son autre main était sur ma bouche. Après un court instant, il posa enfin son regard sur moi. Ses prunelles fixées sur les miennes ne firent qu'accentuer mon malaise, attisant l'angoisse. Ses iris étaient d'une couleur très claire, et presque luisante sous l'ombre que lui procurait le grand capuchon sombre. Leur couleur penchait entre le bleu et le gris. Je ne pus lire aucun véritable sentiment dans ses yeux, ils changeaient sans cesse, traversés par des éclats rieurs. Quelques mèches d'un bleu vif dépassaient de la capuche, tombant su son regard. Son visage pâle était fendu par un sourire hypocrite. Il fit remonter le poignard jusqu'à sa main gauche, et le plaça sous ma gorge, le faisant glisser le long des veines. Mon pouls s'accéléra rapidement sous l'effet de la terreur. Il prononça quelques mots qui m'étaient adressés d'une voix à la fois fascinante et effrayante.

- Tu trembles, prophète. Mais...Je n'ai pas le droit d'être ici...Pour l'instant. A la prochaine, j'aurais au moins vu ce à quoi tu ressembles. Trop de ressources inexploitées.

Je ne pus lui répondre, du fait qu'il m'en empêchait. La minute d'après, il avait déjà disparu sous mes yeux. Je restai un instant sans bouger, me remettant de mes émotions, baladant ma main sur mon cou fin, qui n'avait aucune trace. C'était ça, un chasseur, sur Espérance ? Comment pouvais-je me défendre sans avoir le moindre temps pour réagir ? Je me mordis la lèvre inférieure. J'entendis Aru crier mon nom. Ils me cherchaient. Je sortis de la longue lignée de colonnes et l'aperçus au bout d'une rue, l'air contrarié. Il fit un soupir de soulagement lorsqu'il me vit arriver.

- Ah ! Enfin ! Il faut qu'on rentre, on va être en retard sinon ! Aller, Okoru, téléporte-nous à l'académie.

Il s'exécuta en silence, mais je lus une forte interrogation traverser son regard. Je réapparus en même temps qu'eux en face de l'académie, encore troublée de ma précédente rencontre. Aru me lança "A ce soir" avant d'entrer dans le grand édifice, suivit d'Okoru. J'y entrai à mon tour, me dirigeant vers la salle d'entrainement. Le bâtiment était resté calme et solennel. Mon coeur, lui, était différent, et quelque peu bouleversé.




Alors ? C'était comment ? =3
Je suis en train de faire mon troisième chapitre.
Revenir en haut Aller en bas
Black Moon

Black Moon

Journaliste of sweet paradise ;
Berlingot très très rigolo


- MESSAGES : 564
- DATE D'INSCRIPTION : 25/09/2010
- AGE : 28
- LOCALISATION : Belgium

Papiers
- TEAM: Nounours Powa
- PROFS, ELEVES:
- RELATIONS:
• A Deux Pas de l'Enfer • Vide
MessageSujet: Re: • A Deux Pas de l'Enfer •   • A Deux Pas de l'Enfer • EmptySam 26 Mar - 20:31

Wah ! Va falloir que j'imprime parce que je me perds =)
Je suis jalouse de tes pavé d'écriture =P
Revenir en haut Aller en bas
http://storm-center.forumactif.org/
Contenu sponsorisé




• A Deux Pas de l'Enfer • Vide
MessageSujet: Re: • A Deux Pas de l'Enfer •   • A Deux Pas de l'Enfer • Empty

Revenir en haut Aller en bas
 

• A Deux Pas de l'Enfer •

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Sweet Paradise :: Administration :: Floodαtion à grαndes quαntités :: Fictions-